mercredi 30 novembre 2016

Otis Stacks, Silencio, 29/11/2016.



Tard hier soir, une habitude au Silencio où les concerts ne commencent jamais avant 23h, le magnifique duo Otis Stacks a fêté en grandes pompes la sortie de son EP (chronique ici) dans le cadre luxueux, tout de noir et d'or (déco signée David Lynch), feutré et intime de l'endroit. Sur la petite scène l'élégant duo (chapeau et nœud papillon) nous a dévoilé de nombreux nouveaux titres (un futur album peut-être?), évoluant sur un fil ténu entre soul et hip-hop. Si l'absence d'un véritable backing band se fait parfois un peu sentir Elias, le chanteur, joue à plein de son charisme naturel pour compenser, livrant de nombreuses anecdotes assez éclairantes sur ses textes (« Crash and burn »), parlant beaucoup avec le public et se mouvant avec grâce et élégance sur la scène, assez basse de plafond. Et surtout, quelle voix ! Douce et mélodique, débordant de feeling, son timbre chaud caresse les oreilles. Derrière son attirail, le producteur Just Mike balance le son et parsème le tout de notes issues de son Rhodes (visiblement l'instrument est d'origine) apportant un peu de chaleur humaine à la musique qui serait trop froide et mécanique sans cet apport live. Ainsi Otis Stacks trace un lien imaginaire entre passé et futur, réussissant à rester classique tout en jouant d'une dynamique contemporaine. De l'art d'être moderne et respectueux des traditions sans verser dans le passéisme. Sur scène le duo alterne les ambiances entre morceaux romantiques et langoureux et passages plus enjoués et dansants sous l'influence de l'électro-funk 80s (« Take your coat off ») dévoilant tout un éventail d'émotions que l'on a hâte de découvrir la longueur d'un album…

Bigger, Le Carmen, 29 Novembre 2016.



Dans le cadre somptueux du Carmen, un ancien hôtel particulier fondé en 1875, Bigger a fêté la sortie de son premier EP, « Bones and dust ». Petit rappel, Bigger est un tout nouveau projet mené par deux têtes pensantes, Damien Félix (le guitariste de Catfish) et le chanteur Irlandais Kevin Twomey (Monsieur Pink). Cette nouvelle formation est le medium utilisé par le duo pour exprimer son amour de la pop anglaise et une certaine noirceur à la Nick Cave. Sur scène, cette dernière composante s'efface pour faire place à une pop enjoué, mélodique et festive balancée avec une ferveur toute rock n'roll. Kevin se révèle une véritable bête de scène à l'enthousiasme contagieux, charismatique, sautant un peu partout (le pauvre finira totalement en nage). La formation donne également à voir un autre aspect du talent de Damien Félix. Contrairement à Catfish, où le guitariste se multiplie en trois pour gérer sa guitare, un bout de la batterie et, parfois, des claviers en même temps, dans Bigger, le musicien se concentre sur son seul instrument à six cordes. Son jeu y gagne en profondeur, ses notes et accords sont délivrées avec une intensité inédite, le tout est globalement plus appuyé et, surtout, déborde de feeling. Les claviers de Ben Muller apportent une note baroque originale aux arrangements (« The Zoo ») et constituent un élément fondamental de l'identité sonore du groupe. La section rythmique composée de Mike Prenat (basse) et Antoine Passard (batterie) assure le job et dégage un groove puissant. Le répertoire joué réserve beaucoup de surprises sous la forme de nouveaux titres (de quoi nourrir un album peut-être?) et est riche en tubes immédiats (« The Zoo » notre préférée jouée en clôture). Vivement la suite de cette nouvelle aventure qui s'annonce d'ores et déjà passionnante…

mardi 29 novembre 2016

Brian S. Cassidy : « Alpine Seas »



Premier album solo pour Brian S. Cassidy, un ancien membre d'Okkervil River, qu'il a enregistré seul assurant tous les instruments. Dès les premières notes, l'album s'inscrit dans une veine classique et intemporelle, pas d'expérimentations ou de mélange folk/electronica ici mais un retour aux sources comme le suggère la magnifique pochette. Tout au long de ces dix titres, Cassidy fait d'un manque apparent de moyen une force, une source de créativité. Délicat et harmoniquement très riche l'album n'est dépouillé qu'en apparence, Cassidy agrémentant ses délicats arpèges folk de quelques notes de piano, de banjo et de lap-steel aussi éparses qu'essentielles entraînant la musique sur un territoire country ("Rich Man"). L'album est séquencé avec habilité, évitant de tomber dans la monotonie, alternant le folk intimiste (« I'm an ocean », « A cruise ») et morceaux plus uptempo, en milieu de parcours, dans une veine pop/rock (« Arcadia », « Uncompahgre ») le tout sans jamais perdre de vue ses aspirations roots, un peu comme si Nada Surf se mettait en tête de signer un album country (« The South »). En dépit d'un léger essoufflement en fin de programme, le disque nous semble familier dès la première écoute, une qualité rare…

lundi 28 novembre 2016

Kanazoé Orkestra + Kandy Guira, Café de la danse, 27/11/2016.

Kanazoé Orkestra, Le Café de la Danse, 27/11/2016 (c) Régis Gaudin

Kandy Guira, Le Café de la Danse, 27/11/2016 (c) Régis Gaudin

A défaut de partir en week-end, on a fait un beau voyage en musique en ce dimanche après-midi sur la scène du Café de la Danse. On commence avec Kandy Guira, magnifique chanteuse originaire du Burkina Faso qui se produit en duo avec un guitariste acoustique. Sa voix est aussi chaude et profonde que celle d'une chanteuse soul. Influence qui transparaît en filigrane, ramenant la soul acoustique à ses influences africaines. Mais on surtout touché par l'engagement de la jeune femme, son appel au respect des personnes handicapées lorsqu'elle évoque, en musique, son petit frère atteint de surdité. Une belle découverte, pleine d'humanisme pour débuter la soirée.

Alors que les sept musiciens du Kanazoé Orkestra déboulent sur scène, c'est une vague de chaleur qui s'empare alors du Café de la danse. Prouvant que la musique est un langage universel, les sept musiciens bâtissent des ponts entre le jazz et la musique africaine, le n'goni prenant le relais du saxophone, le tout sous l'égide d'une percussion rythmique insensée partagée entre percussions latino/cubaines, batterie et les deux balafons (pendant africain du xylophone). La musique dégage une onde positive, les musiciens souriants jusqu'aux oreilles et esquissant des pas de danses endiablés derrière leurs instruments. Un enthousiasme contagieux qui se propage dans la salle, cette dernière se transformant en piste de danse vers la fin du concert. Un beau moment de partage, de musique et d'humanisme perceptible notamment dans le discours du chanteur/griot.



Bill Pritchard, Planète Mars, 26/11/2016


Bill Pritchard, Planète Mars, 26/11/2016 (c) Régis Gaudin

Bill Pritchard, Planète Mars, 26/11/2016 (c) Régis Gaudin

Bonne nouvelle pour finir cette semaine très marquée par des concerts 80s, le songwriter Bill Pritchard est revenu nous rendre visite au Planète Mars, un petit bar sympa décoré d'affiches de concerts aussi rocks que la playlist diffusée pour patienter, réécouter un petit Stone Roses (« I wanna be adored ») ça fait toujours plaisir (et accessoirement du bien). Sur ce, le taulier, hilare, viens nous trouver : « J'ai préparé une fausse track list pour Bill », on jette un coup d'oeil sur l'objet du délit où se côtoient des titres de Metallica et de Duran Duran, effectivement ça va être drôle. Hélas, pris par le stress, Bill ne se rendra pas compte de la supercherie, tant d'efforts aussi mal récompensés… Il est un peu plus de 21h00 lorsque Bill Pritchard prendra place sur la petite scène, légèrement surélevée de trois marches : « A sept heures ce matin, j'étais dans le Nord de l'Angleterre et maintenant je suis à Paris. La vie parfois est belle ». L'endroit baigne dans une lumière rouge/orangée onirique. Sur une guitare empruntée à Fred Lo (une gageure, Bill étant gaucher), le chanteur entame son set en solo intégral. Le répertoire est principalement pioché dans quatre albums (en gros ses meilleurs) : « Three months, three weeks and two days » ("Tommy & Co", produit par Etienne Daho, 1989), « Jolie »  ("Number Five", "I'm in love forever", "Maxine" ; 1991) et ses deux (excellentes) sorties les plus récentes sur Tapete Records : « A trip to the coast » et « Mother town hall » ("Mont Saint Michel"). L'écoute s'avère particulièrement intéressante comme l'affirme Bill, « c'est comme ça que je compose » et permet ainsi de découvrir les titres dans « leur versions originales ». La prestation regorge d'anecdotes rigolotes : « C'est comme ça que j'ai joué cette chanson à Etienne Daho chez lui». Un concert très émouvant également lorsque Bill reprend Léonard Cohen (« I'm your man ») ou lorsque rejoint par Frédéric Lo (le producteur de « Crève coeur » et d' « Amours suprêmes ») pour un duo en forme d'hommage au regretté Daniel Darc. Une note nostalgique pour conclure cette chouette soirée.  

samedi 26 novembre 2016

Marie France + Jacques Duvall & Phantom, Le Divan du Monde, 25 Novembre 2016.

C'est un joli plateau que nous a contacté l'excellent label belge Freaksville en ce vendredi soir sur la scène du Divan du Monde. Dans la salle une foule hétéroclite se bouscule et les couples de garçons (Marie France est une icône gay) côtoient les survivants des années punk. Il flotte dans l'air comme un parfum des années 1980…

Un petit mot pour commencer sur Jacques Duvall. Habitué de la coulisse, Duvall est un parolier qui compte ayant travaillé entre autres pour Lio (l'auteur de « Banana Split », c'est lui!) et Alain Chamfort (d'ailleurs discrètement présent dans un coin de la salle). Ses albums en solo sont relativement rares conférant à sa présence sur scène un caractère exceptionnel. Entouré de l'excellent combo garage Phantom, Duvall, déguisé en cow-boy, délivre une prestation rocailleuse et lo-fi bien servi par les guitares arides de Benjamin Schoos, la batterie minimale (aucune cymbale, juste une caisse claire, un tome basse et un tambourin) jouée debout (comme dans le Velvet Underground) et des lignes de basses énormes sur lesquelles reposent tout l'édifice. Le contexte sied particulièrement bien à Duvall, sa plume acerbe et son chanté/parlé guttural, comme venu d'outre-tombe. Le répertoire est quasi-exclusivement constitué de titres de son album « Hantises » (sorti une première fois en 2006, le disque vient d'être réédité en vinyle). Après une petite demi-heure, c'est déjà l'heure de partir, trop court mais excellent.


Changement d'ambiance ensuite avec Marie France et la déclinaison scénique de son dernier album « Chante Jacques Duvall » (on note d'ailleurs que la plume de Duvall est sensiblement différente et moins véhémente lorsqu'il écrit pour d'autres). Accompagnée d'un pianiste, vêtue d'une robe noire, Marie France semble comme échappée d'un cabaret des années 1930. Une prestation de grande classe où la chanteuse laisse apparaître toute sa fantaisie et la grandiloquence qui la caractérise. Chaque chanson prend alors des allures de petite pièce théâtrale ou Marie France joue le premier rôle de la séductrice (« Marcello ») à la prédatrice (« Le cercle rouge »). Incarnant chaque texte à la perfection, la prestation de Marie France transpire le vécu (« Bleu », « C'est Paris »). Emouvant.

vendredi 25 novembre 2016

Allah-Las : « Calico Review »



Enregistré au mythique Valentine Recording Studio de Los Angeles ce nouvel effort des Allah-Las contient, mine de rien, un petit bout de l'histoire du rock. En effet le studio en question, fermé en 1979 et ré-ouvert en juillet 2015, contient en son sein une fameuse table de mixage Audio 610 de 1964, utilisée par les Beach Boys pour le chef d'oeuvre « Pet Sounds » et à laquelle les Californiens ont eu accès. Peut-être est-ce le fruit du hasard mais ce nouveau disque déborde d'ambition et transpire l'été Californien par tous les pores. Ce nouvel album nous fait tomber dans une faille temporelle un peu comme si l'horloge interne du groupe s'était arrêtée un matin de juillet 1967. Un véritable album de plage évoquant le sable et le surf prenant sa source dans les classiques du rock garage et psychédélique. Cool et détendues, les guitares sont déliées et ne s'aventurent guère dans la zone rouge. A la fureur des watts, le groupe préfère une approche alanguie et richement arrangée (clavecin, mellotron, thérémin) tout en privilégiant une orchestration rock où les guitares et batteries occupent le premier plan. La bande-son de l'été sans fin à écouter en rêvassant.


jeudi 24 novembre 2016

Nada Surf : « Peaceful Ghosts »



Enregistré pour le compte d'une radio allemande en juin 2016, la sortie de cet album live de Nada Surf n'était absolument pas prévue et c'est donc par surprise que ce disque a fait son apparition dans les bacs au début du mois. Et pour une surprise, c'est une sacrément bonne, le quatuor atteignant des sommets d'émotion le long de ces treize plages. Quiconque a un jour vu Nada Surf sur scène ne peut que garder un souvenir énamouré du groupe, tant son énergie en live est contagieuse (et si vous avez un doute le « live in Brussels » est toujours disponible). Ici, le contexte est différent et, accompagné d'un grand orchestre (le Deutsches Filmorchester Babelsberg) le groupe prend l'exact contre-pied de ce qui fait habituellement le sel de ses concerts incendiaires, mettant l'accent sur l'émotion suscitée les cascades de cordes, de vents et autres xylophones. Le contexte sied particulièrement au grain de voix mélancolique de Matthew, le chanteur du groupe. Ainsi sur la distance, le groupe réussit un petit tour de force, celui d'accorder son énergie intrinsèque (et elle est grande) avec le cérémonial ambitieux d'un grand orchestre. Si le tracklisting ne réserve que peu de surprise et prend des allures de best-of (le lot commun de tout album live), en revanche on n'a jamais entendu d'aussi belles versions de « Blonde on blonde », « 80 windows », « Beautiful beat », « Blizzard of '77 » ou autres « Inside of love » (juste pour citer quelques exemples). Un excellent album permettant de découvrir le groupe sous un jour différent. On aurait aimé être dans la salle !
En concert à Paris (Le Bataclan) le 02/12.


mercredi 23 novembre 2016

Pihpoh : « Par vagues »



Originaire de Belfort, Pihpoh fait un peu figure d'ovni sur la scène hip hop française. Chez Pihpoh point de glorification d'ego surdimensionné mais une démarche créative se basant sur des textes sensibles et sensés transpirant le vécu, évoquant la vie, ses complications ("Globe-trotter", "Creux") et contrariétés (« Demain ») où les relations complexes avec le sexe opposé (« Mademoiselle », « T'attends », « Par vagues »). Musicalement, Pihpoh tourne le dos aux samples et flirte avec l'électro où plus précisément l'électro-funk d'inspiration 80s (« Demain », « LLLA »). La démarche prend tout son sens sur scène, où l'artiste se produit en trio accompagné par une guitare et une batterie électronique, produisant une musique festive et dansante. Un album attachant.

mardi 22 novembre 2016

Kanazoé Orkestra : « Miriya »



Kanazoé Orkestra est avant tout le projet d'un musicien, Seydou Diabaté. Balaphoniste surdoué, ce dernier arrive en France en 2010 en provenance du Burkina Faso. Installé dans la région Toulousaine, Diabaté s'entoure de musiciens venus d'horizons divers. Un métissage remarquable caractérise la musique entre tradition mandingue et improvisations jazz où se mêlent instruments vernaculaires (n'goni) et cuivres que l'on jurerait échappés d'une formation free (« Why ? »). La musique voyage ainsi librement de continent en continent piochant dans chaque tradition au fil de l'inspiration trouvant un terrain d'entente propice au dialogue entre les cultures. Comme souvent en matière de musique africaine, le disque est placé sous le sceau du rythme. L'affaire est en effet menée sur un tempo extatique, proche de la transe (cf. « Faden Yélé ») et tire profit de la multitude d'intervenants rythmiques (signalons la participation de Stéphane Perruchet, percussionniste spécialisé dans les rythmes d'Afrique de l'Ouest et de Cuba). On reste coi devant la virtuosité de Seydou Diabaté ("Nanifa") au balafon (une sorte de pendant africain du xylophone) et ses descentes casse-cou ultra-rapides et d'une précision sans appel. Son dialogue musical riche et incessant avec les percussions et la batterie (cf. « Dianfa ») constitue le point d'orgue d'un album en forme de voyage musical. Dépaysant.
En concert le 27/11 (17h) à Paris (Café de la danse)


The Joy Formidable : « Hitch »



Formation Galloise, The Joy Formidable a décidé de prendre son destin en mains. Son troisième album, intitulé « Hitch », a été enregistré dans le studio construit par le groupe (The Red Brick) et sort sur le label monté pour l'occasion par le trio (C'mon let's drift). Une déclaration d'indépendance qui laisse augurer de belles choses, une fois débarrassés des contingences imposées par une maison de disques. Et de fait l'entrée en matière est excellente avec trois titres coups de poings « A second in white », « Radio of Lips » et « The Last thing on my mind » rappelant les grandes heures du rock indé des années 1990, portés par des guitares incisives et des refrains fédérateurs taillés pour les stades. Hélas bien vite, le trio déchante et se prend les pieds dans un écueil récurrent du format CD : la longueur. Le groupe a vu trop grand, remplissant au maximum l'espace disponible. Résultat un album au nombre de plages pas forcément délirant (12 titres) mais exagérément long (67 minutes). Difficile de tenir le rythme sur la longueur. Au bout d'un moment, l'affaire tourne en rond, les titres défilent mais peinent à retenir l'attention (« The Brook », « Underneath the petal », "The Gift"). L'absence de direction artistique venue de l'extérieur se fait alors cruellement ressentir. Il convient de saluer la prise de risque mais les réussites, réelles, peinent à gommer ce sentiment de rendez-vous manqué pour le groupe. Dommage.
En tournée en première partie de Placebo en novembre.


dimanche 20 novembre 2016

Catfish : « Dohyo »



Le Dohyo désigne le cercle au sein duquel se retrouvent deux sumos avant d'entamer la lutte. C'est également le titre du deuxième album de Catfish, comme un aveu de la part du duo qui pratique la musique comme la résultante d'une confrontation entre deux univers. Le titre trouve tout son sens le long de ce deuxième album qui voit cet attachant groupe évoluer en douceur. Toujours fidèle au blues, l'album démarre avec « Landmarks », un premier titre aux relents garage rock où l'influence bleue se fait sentir dans la guitare inspirée de Damien Félix. L'introduction est quoi qu'il en soit parfaite. Mais bien vite, Catfish se joue des étiquettes et des codes embarquant sa musique dans des directions inattendues, invitant des synthés dans la danse, toujours utilisés à bon escient et avec parcimonie pour un résultat évoquant la new/cold wave des années 1980 (« Rebirth », « No reason »). Ailleurs, le duo lâche les chevaux, flirtant avec le punk (cf. « The Feather »), contexte dans lequel la chanteuse Amandine se révèle particulièrement à l'aise et laisse exploser toute sa puissance vocale (elle est, de plus, assez impressionnante sur scène). Mais Catfish sait aussi jouer sur la retenue et délivre coup sur coup avec « The Tree » et « Take your time » deux superbes ballades, caverneuses à souhait et suintant le blues. Si le groupe s'essouffle un peu en fin de programme avec quelques titres un peu plus anecdotiques, l'ensemble, à la fois homogène et varié, voit le duo évoluer à un niveau assez élevé. Un excellent disque, produit avec soin confirmant Catfish dans sa posture de groupe avec lequel il faudra désormais compter.
En concert le 24/11 à Paris (Divan du Monde)

vendredi 18 novembre 2016

Frustration : « Empires of shame »



Chantre d'une vague froide à la française depuis une bonne dizaine d'années, pionniers du label Born Bad dont ils sont l'une des premières signatures, Frustration sort son nouvel opus, le troisième en dix ans. Intitulé « Empires of shame », ce dernier est une véritable déflagration sonique, une droite rock n'roll bien sentie propre à mettre KO les oreilles les plus blasées. Car chez Frustration on ne fait pas les choses à moitié. Quand il s'agit de sortir les guitares, on y va franchement et le résultat est absolument tourneboulant (« Excess », « Dreams, laws, rights and duties »). Mais la chose devient passionnante lorsque cette tornade punk se mélange à un feeling dark perceptible dans la basse (sous influence Peter Hook) ou dans le chant caverneux de Fabrice Gilbert qui a réussi à faire de son anglais imparfait une force, apportant une note prolétaire bienvenue en cette époque troublée. Compensant la rage féroce des guitares par des synthés cheap (« Mother earth in rags », « Cause you ran away »), Frustration multiplie les clins d’œil vers la scène cold wave des années 1980, on pense ainsi souvent à Joy Division voire aux Sisters of Mercy tout en déployant une fureur rock n'roll que ces derniers n'ont jamais pu atteindre. Placée à mi-parcours « Arrows of arrogance » offre une pause acoustique bienvenue au milieu du chaos. Court, incisif et percutant, « Empires of shame » dépasse à peine la demi-heure. Et c'est presque heureux tant l'auditeur finit l'écoute exsangue. Encore une sortie ultra-classe à mettre au crédit de l'excellent label Born Bad.


jeudi 17 novembre 2016

Otis Stacks



Avec un nom pareil, évoquant à la fois Otis Redding et la Stax, on pouvait s'attendre à un projet soul revival de derrière les fagots. Et s'il y a un peu de cela dans la musique d'Otis Stacks, c'est surtout aux Roots (celui des débuts) que l'on pense et à l'album « Do you want more? » en particulier. Du hip hop, pratiquant un groove chaud et organique sur lequel le flow éraillé du chanteur Elias Wallace roule comme sur du velours. La musique composée par l'autre moitié du duo, le producteur Danois Just Mike, est un savant alliage entre synthés analogiques vintage et instruments électriques/acoustiques piochant dans les influences soul et hip hop. Complété par une kyrielle de versions instrumentales et de remixes, ce court EP ne comprend que deux originaux. Trop peu pour se faire une idée définitive mais notre curiosité est définitivement éveillée. Affaire à suivre…

mercredi 16 novembre 2016

Manu Lanvin : « Blues, Booze & Rock n'Roll »



Blues, gnôle et rock n'roll, c'est un sacré programme que nous a contacté Manu Lanvin pour son troisième album. Alléchante sur le papier, la proposition tient toutes ses promesses sur disque. Passé par la case « chanson rock » à ses débuts, c'est après une collaboration avec le regretté Calvin Russell en 2009 (« Dawg eat dawg », l'ultime disque du Texan) que Manu a vu la lumière (bleue of course) ! Ce nouvel album s'impose donc comme l'étape suivante, un disque au feeling blue incontestable perceptible aussi bien dans le touché de guitare inspiré (« Whipping boy ») que dans le chant grave, éraillé, légèrement cassé au fond de la gorge et transpirant le vécu, les hauts et les bas, les coups durs, la vie quoi ! Serré par des guitares foncièrement rock/garage au gros son bien gras, Manu canalise son énergie en soignant ses arrangements usant du piano, de l'harmonica ou des cuivres (« She's da bomb »), rendant ainsi hommage au blues dans toute sa diversité, clignant de l’œil aussi bien vers le Nord (Chicago) que vers le Sud (New-Orleans). Qui sait si l'expression « Blues rock » a un jour eu un sens ? Quoi qu'il en soit elle trouve en ce nouveau disque un formidable exemple. Un album touchant même lorsqu'il débranche les amplis (l'acoustique « R U There ») ou rend hommage au grands disparus (« JJ Cale on the radio »). Conseillé.

mardi 15 novembre 2016

Pumarosa


Découvert sur scène l'été dernier lors des Eurockéeennes de Belfort, Pumarosa nous avait fait une excellente impression confortée par l'écoute du premier EP du quintet Londonien. Se jouant des contrastes, Pumarosa mélange guitares post rock et punk et influences électroniques. Entre six cordes brûlantes et nappes synthétiques froides, Pumarosa trouve la bonne formule, terriblement accrocheuse dès la première écoute et dégageant un fort pouvoir de séduction hypnotique. C'est sur la longueur que Pumarosa exploite le mieux ses qualités intrinsèques, lorsqu'ils arrivent à conjuguer efficacité pop/rock et répétition de motifs hypnotiques sans jamais tomber dans l'ennui (cf. « Cecile »). Agressif et planant en même temps, Pumarosa trouve ainsi son créneau, naviguant à vue entre psyché, cold wave et punk. Nulle surprise dans ce contexte, le fantastique « Priestess » d'ouverture (pas loin de 8 minutes) est la meilleure chanson du lot, un véritable tube en puissance, la grande réussite de cette première livrée fort prometteuse. A suivre.

En concert le 20 novembre à Paris (La Boule Noire)


mardi 8 novembre 2016

The Pretty Reckless : « Who you selling for »



En 2014, The Pretty Reckless a rencontré un succès monstrueux avec « Going to hell », un album faisant revivre les grandes heures du hair métal des années 1980. Des années qu'une chanteuse dans un vrai groupe de rock n'avait rencontré un tel succès public (surtout aux Etats-Unis). Menée par la chanteuse/actrice Taylor Momsen (vue dans la série Gossip Girl) la troupe opère un virage en douceur sur ce nouvel effort. C'est peu dire que le disque débute de manière pour le moins surprenante avec une intro en piano/voix (magnifique « The walls are closing in »), étonnant venant de la part d'un groupe qui avait fait du déluge de décibels sa signature. Si le reste de l'album n'est pas forcément du même acabit (« Oh my God » vaut son pesant de watts) force est de constater que ce nouvel album voit le groupe délaisser le gros son au profit d'une démarche plus nuancée, inspirée en partie par le blues (« Take me down », « Prisoner », « Back to the river »), idiome qu'ils maîtrisent de manière imparfaite, incapables qu'ils sont d'abandonner leurs tics hérités du rock FM. Ailleurs, « Wild City » et sa guitare wha-wha marche sur les plates-bandes de Jimi Hendrix émulant la BO de « Shaft » (Isaac Hayes) !!! Les puristes du blues et de la soul auront bien du mal à trouver leur bonheur dans ce disque, car The Pretty Reckless reste en dépit de tout un très bon groupe de rock, dont la nouvelle inspiration sied à merveille à la chanteuse Taylor Momsen dont le chant, suave et terriblement sexy, n'a jamais été aussi bien mis en valeur.
En concert le 26/01 à Paris (Le Bataclan)


lundi 7 novembre 2016

Interview with Eli « Paperboy » Reed







After a few setbacks in the ruthless business of music, Eli « Paperboy » Reed is back with a new record titled, « My way home », which lies closer to his musical roots. Eli told us about his path so far to his « home ».  Eli told us about the long path he had to take to get back to his « home ».

RG: The first thing I'd like to say is: « It's good to have you back »!
Do you like being on the road?
Eli Reed: Thanks (smile). Sometimes, it's (being on the road) not the easiest thing to do. But when you have a great show and so on, it's fun.

RG: After having been dropped by one of the major record labels, did you ever consider giving up music and getting a regular job - 9 to 5, 5 days a week?
Eli: It was more of a mutual departure but that's ok. It's a hard question. I don't know who hasn't considered that sometime in their career. Music is hard, man. Making music for a living is really hard. I like to be doing something every day. And when you're not touring or making or promoting a new record, sometimes you're just doing nothing. And that's not fun. And also you have setbacks and you're at the whims of fans and things that you can't control. It's not an easy way to make a living. Sometimes you wish you had a steady paycheck for sure.

RG: Why are you standing in a boxing ring on the album cover?
Eli: The exact same reason. It's a fight, man. It's always a fight. And especially when you're trying to get to where you want to be. When you're trying to achieve something musically. There are a lot of factors. It's always a battle. And I don't mean to be dramatic or anything. I also just like the idea of being in a boxing ring on the cover of my record. I think that's awesome.

RG: It's pretty cool indeed…
Eli: Yeah, we did it in that old boxing gym in Brooklyn. Everything about doing this is a fight, a battle. Always.



RG: The new album is called « My way home », how would you describe your “home” from a musical standpoint?
Eli: There is more than one way for different artists to be successful and make a living even if there aren’t that many people every night. But it's still hard. It's hard to find a home, I don't know I wish I had an answer for that. 

RG: Your lyrics are so serious sometimes, I'm thinking about a song like « What have we done »...
Eli: I don't like to be making political music but I think that people should take responsibility for the way we're treating our planet. I wanted to write a hymn. It's a hymn for today, I think we should all get behind. I don't have the answers to all the questions that I pose in the song. That's the point of it - that we don't know.

RG: Listening to the new album I thought you were coming to terms with your music. No offense, but I didn't really like the previous record… I didn't really recognize you on the record « Nights like these »…
Eli: Sure, no problem. It's a shame but I understand. I made the record myself, I wrote all the songs. There was a lot of me in there. I wanted to make a record that was different and push the boundaries and that wasn't the same old record. I'm happy I did it, no matter what happened. I wish I’d got more of an opportunity to promote it because I would have. Honestly, it's not necessarily what comes naturally to me but it doesn't mean it was a bad idea. Sometimes you have to push yourself to get out of your comfort zone. This new album is definitely what comes naturally to me. It's more of what just comes out of me when I start to play and sing. Which is great. There is a place for all things and if you’re not challenging yourself as an artist or musician you're gonna stagnate and not make good records. At this point in my career I had to go back and do something that was just what I know how to do.

RG: Have you been, in some ways, influenced by rock n' roll? I feel a real sense of urgency on this new record on songs like « The Strangest Thing » and « A few more days »...
Eli: « The Strangest thing » is a gospel number, a church song (laughs). I love The Sonics and stuff like that. It's a trashy record but I wouldn't say it's my main influence; I don't listen to rock n' roll music too much.



RG: Can you tell us about your involvement with the gospel for teens program?
Eli: It's a program that I work with in Harlem, New York. I’ve been working with them for the last three years. I teach a group of young men about gospel quartet music. It's a rotating class, some of the kids have been there the whole time and some are new. I get new kids every class. It's incredibly humbling and exciting to work with these kids, they're super talented and so much fun. I love it. It’s taught me a lot about music too. It has made me spend more time thinking about how it all comes together, the harmony and everything. It's been a very positive experience for me on every level.

RG: Did you think you needed something like that after what happened with the record label?
Eli: I was already doing it. But it sure saved me after that. I wasn't doing anything else after Warner Bros.

RG: Working with kids, was it a way to give back to music?
Eli: Sure, of course. Nobody was teaching any of these kids about quartet music, that particular kind of gospel. So I thought it was important that that music have a voice. Not just the big choirs. Because that is the stuff that I like, the small groups.

RG: I have seen you many times in concert with your band The True Loves and I remember that show with the Right Ons at Le Trabendo. It was the last show of the tour, you were fooling around on stage, it was funny. Was it hard to break up your band The True Loves, you seemed to be really good friends with them…
Eli (smiling): The band never broke up. It's the same band, same guys. It's not the True Loves anymore. It's just something we came up with. It wasn't really a band. Mike and JB who are playing with me tonight were in the True Loves. All those guys are my friends.



RG: Do you still feel close to the city of Boston?
Eli: Yes, I'm back all the time. I don't have family there anymore but my wife's family, they're all living there. I collect soul and gospel music 45 from Boston. I have a specific collection of that. There's a lot of them. Well, not that many actually but enough to keep me busy. I love living in New York, it's my home now, but I also love Boston. I've been living in New York for ten years, most of my grown up life. Boston is a special place for me.

RG: Just being curious, a few years back you were singing « I'm gonna break every heart I can », how did that work out for you?
Eli: That was a cover.

RG: Yes I know, it's a country song…
Eli: That's Merle Haggard.

RG: He passed away not too long ago…
Eli: I was such a huge Merle fan. I want to do a whole album of Merle's songs actually. One day I think I'll do it…

RG: So back to my question, did it work out for you, breaking every heart you can?
Eli: I was already married at that point anyway (laughs)…

Interview 3 JUNE 2016
Many thanks to Angela Randall !!!!!



Interview avec Eli « Paperboy » Reed






Tout clichée qu'elle soit, l'expression « revenir de loin » prend un sens particulier aujourd'hui. Assis dans les loges de la boule noire, quelques heures avant son concert, Eli Reed revient de loin. Lâché successivement par deux majors de l'industrie musicale, on le pensait fini, perdu pour la musique, après la sortie en 2013, de l'album, décevant, « Nights like these » ; comme une allégorie de notre monde moderne, ultra-rapide, où les carrières se font et se défont en un clin d’œil. Mais c'était mal connaître le personnage. D'inspiration gospel, dopé aux guitares garage rock, le magnifique « My way home » signe le retour en grande forme d'Eli « Paperboy » Reed. Assis sous l'impressionnant plafond, entièrement recouvert d'anciennes affiches de concert, des loges de la boule noire, il est temps de mettre le magnéto en route...

Bonjour Eli, la première chose que j'ai envie de te dire c'est : Ca fait plaisir de te revoir !
Eli Reed (sourire) : Merci !

Tu aimes être sur la route ?
Eli : Parfois, ça n'est pas la chose la plus simple. Mais quand le show se passe bien et tout, alors c'est fun.

Après avoir été lâché par une major, est-ce que tu as pensé abandonner la musique et prendre un boulot régulier, du genre neuf heures – dix-sept heures, cinq jours par semaine ?
Eli : C'était plus une séparation par consentement mutuel, mais c'est ok. C'est difficile comme question. Je ne connais personne qui ne se soit pas posé cette question à un moment donné de sa carrière. Mec, la musique c'est dur ! C'est un métier vraiment difficile. Moi, j'aime bien être actif tous les jours. Et quand tu n'es pas en tournée ou en train de faire ou de promouvoir un nouveau disque, et bien tu n'as rien à faire. Et c'est pas marrant. Sans parler des échecs et alors tu te retrouves à la merci des fans et d'autres choses impossibles à contrôler. Ce n'est pas la façon la plus simple de gagner sa vie. Parfois, tu aimerais avoir une fiche de paye à intervalles réguliers, ça c'est certain.



Pourquoi poser sur un ring de boxe sur la pochette du nouvel album ?
Eli : Pour la même raison. C'est un combat, mec. C'est toujours un combat. Surtout quand tu essayes d'atteindre un certain niveau. Quand tu essayes d'accomplir quelque chose, musicalement parlant. Il y a tellement de facteurs qui entrent en jeu. C'est toujours une bataille. Mais attention je ne veux pas donner l'impression d'être dramatique ou quoi que ce soit. Et puis j'aime bien l'idée d'être sur un ring de boxe sur la pochette de mon album. Je trouve ça génial !

C'est plutôt cool, en effet…
Eli : Ouais ! La photo a été prise dans une vieille salle de boxe à Brooklyn. Dans ce milieu, il faut se battre sur tout, tout le temps. Toujours…

Ce nouvel album s'appelle « My way home », comment décrirais-tu cette « maison », musicalement parlant ?
Eli : Il y a plusieurs façons pour un artiste d'avoir du succès et de gagner sa vie même si les salles ne sont pas pleines tous les soirs. Mais c'est toujours difficile. C'est difficile de trouver « une maison », je ne sais pas, j'aimerai avoir une réponse…

Les paroles sont parfois très sérieuses, je pense à une chanson comme « What have we done »...
Eli : Je ne voulais pas faire un disque politique, mais je pense que l'on doit prendre nos responsabilités quant à la façon dont on traite notre planète. Je voulais écrire un hymne. C'est un hymne pour aujourd'hui. Je pense qu'il faut que l'on dépasse tout cela. Je n'ai pas toutes les réponses aux questions posées dans la chanson et c'est justement le problème, on ne sait pas…

En écoutant le nouvel album j'ai eu l'impression que tu t'étais réconcilié avec ta musique. Sans vouloir te vexer, je n'ai pas aimé l'album précédent « Nights like these » sur lequel j'ai eu du mal à te reconnaître…
Eli : C'est dommage mais je comprends, pas de problème. Ce disque (Nights like these, ndlr) je l'avais fait moi-même, j'avais écrit toutes les chansons, il y a beaucoup de moi-même dedans. Je voulais faire un disque différent, repousser les limites, ne pas toujours sortir le même album. Et je suis heureux de l'avoir fait, quoi qu'il ait pu se passer par la suite. J'aurais aimé avoir l'opportunité de le promouvoir plus, parce que je l'aurais fait. Honnêtement, ce n'était pas forcément la musique que j'aurais fait naturellement mais cela ne signifie pas que c'était une mauvaise idée. Parfois, il faut se pousser soi-même hors de sa zone de confort. Ce nouveau disque, en revanche, ressemble à ce qui me vient naturellement quand je commence à jouer et à chanter. Ce qui est très bien. Il y a une place pour chaque chose et sans challenge, un artiste ou un musicien stagne et sort de mauvais disques. Arrivé à ce point de ma carrière, il fallait que je retourne vers quelque chose que je savais faire…



As-tu été d'une certaine manière influencé par le rock n'roll ? Il y a un sentiment d'urgence qui se dégage de certaines chansons comme « The strangest thing » ou « A few more days »…
Eli : « The strangest thing », c'est un gospel, une chanson d'église (rires) ! J'aime bien les Sonics et les trucs comme ça. L'album est un peu trash, mais je ne dirai pas que c'est mon influence majeure pour autant. Je n'écoute pas trop de rock n'roll.

Peux-tu nous parler de ton engagement auprès du programme « Gospel for teens » ?
Eli : C'est un programme, à Harlem, avec lequel je travaille depuis trois ans. J'enseigne les quartet gospels aux jeunes. C'est un cours un peu mouvant, certains gamins sont là depuis le début et d'autres arrivent en cours de route. J'ai des nouveaux gamins à chaque cours. Travailler avec ces gosses, c'est une leçon d'humilité et c'est aussi très excitant. Ils sont super talentueux et très marrants. J'adore ça ! Et j'ai aussi beaucoup appris sur la musique par la même occasion. Cela m'a obligé à réfléchir sur la façon dont tout s'imbrique. L'harmonie, tout ça. C'est une expérience très positive à tout points de vue.

Et penses-tu que tu avais besoin d'une expérience de ce genre après tes déboires avec le business ?
Eli : Je le faisais déjà avant. Et ça m'a sauvé en quelque sorte. Je n'avais plus grand-chose à faire après l'épisode « Warner Bros »…

Travailler avec des enfants, c'est un moyen de payer ta dette, de rendre quelque chose à la musique ?
Eli : Oui bien sur. Personne n'enseignait la musique des quartets à ces gamins. Ce genre particulier de gospel. C'était important, dans mon esprit, de donner une voix à cette musique. Le gospel ce n'est pas uniquement les grands chœurs. Moi j'aime les petits groupes.

Je t'ai vu plusieurs fois en concert avec ton ancien groupe The True Loves et je me souviens en particulier de ce concert au Trabendo avec les Right Ons. C'était la dernière date de la tournée et une grosse fiesta sur scène, c'était marrant. A-t-il été difficile de se séparer des True Loves, vous sembliez être très amis ?
Eli (sourire pensif) : Le groupe ne s'est jamais séparé en fait. C'est le même groupe, les mêmes personnes. C'est juste que maintenant on ne s'appelle plus les True Loves. C'étaot juste un truc qu'on avait monté comme ça, il n'y a jamais vraiment eu de groupe. Mike (Montgomery, basse, ndlr) et JB (Flatt, claviers, ndlr) qui vont jouer avec moi ce soir ont été dans les True Loves. Tous ces mecs sont mes amis.



Te sens-tu toujours proche de la ville de Boston ?
Eli : Oui, j'y retourne tout le temps. Je n'y ai plus de famille personnellement mais du côté de ma femme, ils sont tous de Boston. Je collectionne les 45 tours de soul et de gospel des groupes de Boston. J'en ai toute une collection spécifique. Il y en a beaucoup. En fait non, pas tant que ça mais suffisamment pour m'occuper. J'adore Boston mais j'adore aussi vivre à New York qui est devenu ma maison maintenant. J'y vis depuis dix ans, c'est une grande partie de ma vie d'adulte. Boston reste un endroit avec une signification spéciale pour moi.

Pour finir sur une note légère, il y a quelques années tu chantais « I'm gonna break every heart that I can » (je vais briser tous les cœurs possibles, ndlr). Comment ça a marché pour toi ?
Eli : C'était une reprise !

Oui je sais c'est une chanson country…
Eli : C'est Merle ! (Haggard, ndlr)

D'ailleurs, il nous a quitté il y a peu (le 6 avril 2016, ndlr)…
Eli : J'étais un grand fan de Merle. Je veux faire un album entier de reprises de Merle Haggard. Je pense que je vais vraiment le faire un jour !

Et donc pour en revenir à ma question, comment ça a marché pour toi (rires) ?
Eli : Oh tu sais, j'étais déjà marié à l'époque (rires)...

Propos recueillis le 3 juin 2016.