samedi 31 décembre 2016

Yuma Sun : « Watch us burn »



Pourquoi se contenter de formules toutes faîtes quand tant de formes restent à inventer ? S'amuser et expérimenter, de ce constat est né Yuma Sun, formation atypique œuvrant dans le Dommesdagrock. Dommesdagrock, kesako ? Un ovni musical ! Tout part de la base, la country, le rock n'roll et un soupçon de blues. Rien que du très classique. Ce qui change ? L'interprétation, inspirée par le punk, le métal, le stoner et une bonne dose de noirceur. A l'écoute cela donne un bon paquet de guitares détraquées réinterprétant les idiomes précités sur un mode gothique inédit soutenu par un banjo et une lap-steel apportant l'indispensable caution roots. Le chant inspiré de Jaran Hereid apporte la touche finale, une émotion perceptible dans sa voix faisant chavirer l'auditeur. Le tout est mis au service d'une écriture fédératrice (« Violets to Stone », « St Louise », « Judas Tree » soit autant de tubes dans un monde parfait). Une bonne surprise venue de Bergen, Norvège !

mercredi 28 décembre 2016

Bebo Best And The Super Lounge Orchestra : « Jazz Mamba »



Alors que pour bon nombre de groupes, la quête d'un « son vintage » prend des airs de graal absolu, Bebo Best et son groupe The Super Lounge Orchestra se chargent de propulser les années 1960 dans le futur. Un petit coup d’œil sur la pochette suffit pour s'en persuader, la couleur de ce projet est définitivement rétro mais l'étiquette est bien trop réductrice. En effet, le groupe excelle dans un entre-deux unique en son genre. Les amateurs de musique latine seront aux anges. Percussions folles, cuivres pêchus, orgue Hammond, guitares et basse : tous les ingrédients sont ici réunis. Mais pas uniquement. Grâce à l'aide précieuse du DJ Robert Passera, la musique prend une tournure inattendue : quelques beats bien sentis ici et là, quelques samples (des dialogues de films par exemple cf. « Mamba Jazz ») suffisent à transformer ce disque en objet sonore tout à fait inédit, sans en dénaturer la nature intrinsèquement rétro, ancrée au cœur d'un triangle latin/jazz/funk. Résultat : un cocktail festif et dansant, tout à fait indiqué pour rentrer dans la nouvelle année avec allégresse ! A noter, la jolie reprise du « Heroes » de David Bowie.

lundi 26 décembre 2016

Jazz loves Disney




Quiconque à un jour vu « Fantasia » (1940) connaît les liens étroits entre la musique et l’œuvre de Walt Disney. La présente compilation voit le producteur Jay Newland réunir une kyrielle de superstars du jazz vocal (China Moses, Hugh Coltman, Stacey Kent, Anne Sila etc...) se réapproprier le répertoire issu des bandes originales des films Disney. Le résultat est assez harmonieux quoiqu'un peu sage. Ce qui n'empêche pas les excellentes surprises. Gregory Porter se révèle une fois de plus un vocaliste d'exception sur la reprise de « When you wish upon a star » (Pinocchio), Jamie Cullum réinvente le thème des « Aristochats » (« Everybody wants to be a cat ») avec un petit grain de folie rythmique bienvenu qui fait trop souvent défaut sur cet album. Enfin seule (« He's a tramp » - La belle et le clochard) ou accompagnée par la classe latine de Rafael Gualazzi (« The Bare Necessities » - Le livre de la jungle) Melody Gardot révèle une sensualité vocale digne d'une femme fatale. La seule à pouvoir rivaliser dans le registre est, peut-être, China Moses (« Why don't you do right » - Qui veut la peau de Roger Rabbit). Pour finir, signalons la reprise, en français s'il vous plaît, de « Un jour mon prince viendra » par Nikki Yanofsky. Classique, l'écoute de l'album se révèle néanmoins agréable en dépit d'un manque d'éclat. La bande son idéale pour les fêtes de fin d'année.

samedi 24 décembre 2016

Cirque LE ROUX, Bobino, 23 décembre 2016.




On est bluffés dès le générique évoquant un film noir hollywoodien. L'action se déroule dans les années 1930. Dans un décor rétro à souhait, les quatre acrobates/danseurs rivalisent de folie, de dextérité, faisant fi de la pesanteur, comme un défi lancé aux lois de l'attraction terrestre. Même si l'intrigue reste un tantinet absconse à nos yeux, les tableaux défilent et on est subjugué par ces corps se mouvant avec grâce, dans cet entre-deux étonnant, là où l'art rejoint la performance physique et sportive. Le final est époustouflant, l'immense pole dressé au milieu de la scène en tremble encore !

Cirque LE ROUX – The Elephant in the room

A Bobino (19h00) du mercredi au samedi jusqu'au 14 janvier 2017.

vendredi 23 décembre 2016

Scores : « The Gate to leave »



Alors que les premières notes résonnent, il ne reste que peu de place pour le doute : Scores vit pour le rock n'roll d'une époque qu'ils n'ont pas connu : les années 1970. Riffs de guitares énormes, batteries speedée : chez Scores le rock se vit les potards dans le rouge et à fond la caisse (« Good night », « Leave me now »). Ceci étant dit, un titre comme « That's the girl » apporte un peu de recul dans cette ambiance rétro et noisy, plus lent, plus mélodique, plus acoustique, une bonne indication de ce que le groupe peut apporter dans un registre différent. Sur la magnifique pochette, rappelant Black Sabbath, un inquiétant personnage ouvre une porte vers l'inconnu. Serait-ce une machine à remonter le temps ou bien, tout simplement, un passage vers le nirvana du rock n'roll ? Ecoutez ces quatre titres et vous le saurez…

jeudi 22 décembre 2016

Un nouveau clip pour Teleferik

De retour de Corée, Teleferik nous envoie un nouveau clip illustrant "Les lois de la physique" (extrait de "Lune Electric" le premier album du groupe) aux allures de film de vacances... Dépaysant !

http://teleferikband.com
https://www.facebook.com/teleferikband

Cyril Adda Trio, Marché de Noël de Créteil, 20 décembre 2016


Mardi, en fin d'après-midi, on a découvert le trio de Cyril Adda sous le chapiteau du marché de Noël, dans une ambiance faîte de guirlandes et de boules de sapin. Alors que ses doigts dévalent sur le clavier du piano, Cyril nous explique son parcours. Pianiste de jazz, souvent employé pour animer divers manifestations, Cyril a ressenti le besoin de passer à autre chose, la chanson. La première partie du concert voit le trio se produire en formation jazzy (piano, contrebasse, batterie). Le répertoire est composé de chansons originales dans lesquelles transpirent les influences jazzy des musiciens, perceptibles notamment dans le swing imparable de la section rythmique (Bertrand Beruard à la basse, Xavier Roumagnac à la batterie). Sur des musiques évoquant les premiers Michel Jonasz ou Claude Nougaro, Cyril chante les petits tracas de l'existence (« Le club de gym »), des souvenirs liés à l'enfance (« La baraque à frites » évoquant un déménagement dans le sud de la France) ou des thèmes d'actualités plus sombres (« Nafissatou Diallo », du nom de la femme de ménage du Sofitel, cf. l'affaire DSK). Projet aux contours encore en gestation, la deuxième partie se révèle plus pop/rock. Cyril passe du piano à la guitare électrique et Bertrand troque sa contrebasse pour une basse électrique à cinq cordes. Le chanteur semble moins virtuose guitare en mains (au point de s'égarer dans une chanson). Toujours aussi fine, la section rythmique quant à elle, impressionne également dans ce contexte moins swing et plus puissant. Même en version pop/rock, la répertoire reste marqué par la chanson, dans un registre soft proche de la FM. Un trio frais et sympa, mais manquant encore un peu de personnalité dans son incarnation guitare.


mardi 20 décembre 2016

Nawel Ben Kraïem : « Navigue »



Un pied sur chaque rive de la Méditerranée, la Franco-Tunisienne Nawel Ben Kraïem mélange instrumentation acoustique traditionnelle et arrangements électroniques (« Majnoune »). L'ensemble forme un étrange ovni pop traversant les frontières aussi sûrement qu'il mixe les cultures par le biais d'un chant en langues française et arabe. L'écrin est idoine pour faire briller de mille feux la voix éraillée, légèrement cassée façon soul de Nawel. Un chant qui émeut, submerge et que l'on avait déjà entendu aux côtés d'Orange Blossom. Ces quatre titres sont un avant-goût du premier album de Nawel que l'on devrait découvrir l'année prochaine.

lundi 19 décembre 2016

Louis Arlette



Avec ce premier EP, Louis Arlette signe de bien intriguants débuts. Contrairement à bon nombre de ses contemporains, Louis n'a pas peur d'une part de chanter en français, des textes sensibles (cf. « L'avalanche ») ni, d'autre part, d'expérimenter avec la matière sonore, entraînant la chanson française sur un terrain inattendu évoquant l'électro voire l'industriel (« Les Etaux », « L'avalanche »). Et puis il y a la voix de Louis, un timbre fragile, toujours sur le point de flancher, renforçant l'aspect particulièrement émotionnel de sa musique. Cet EP s'écoute comme une mise à nu, sombre mais étrangement lumineux en même temps : c'est une révélation !

dimanche 18 décembre 2016

Louis-Jean Cormier : « Les Grandes Artères »



Ancien leader de Karkwa, souvent décrit comme le Radiohead francophone, Louis-Jean Cormier est une célébrité dans son Québec natal. A telle enseigne qu'il est membre du jury de ce que nos cousins Québecois appellent « La Voix », l'émission que nous désignons, en bon français, « The Voice ». Son deuxième album en solo, voit Louis-Jean débarquer en France. Comme souvent au Québec, Louis-Jean Cormier est à cheval entre plusieurs cultures, francophone en Amérique du Nord, au croisement des cultures. C'est un peu un résumé, de l'album, étonnant par sa diversité, partant parfois dans des directions étonnantes. De Karkwa, il reste un certain sens de l'emphase, une sorte de grandeur musicale qui se fait jour au travers d'arrangements ambitieux et alambiqués sans toutefois tomber dans la surenchère maladroite (« Vol plané »). Mais à côté de cela, « Les grandes artères » est également un album de chansons aux textes justes et émouvants (cf. « J'aime mieux rêver que de voir sans y croire » in « La fanfare » ; la sublime « Faire semblant » ; « Traverser les travaux ») dont les contours acoustiques se parent d'atours folk (« Le jour où elle m'a dit je pars » ; « Jouer des tours ») et country, banjo à l'appui (« Tête première », « Traverser les travaux »). Dans ce contexte la reprise de « Complot d'enfants » (Félix Leclerc) fait office de lien entre les différents univers et de figure tutélaire. Un excellent disque qui sort enfin en France, ça n'a l'air de rien dit comme ça, mais c'est une très bonne nouvelle.
En concert le 16 mars 2017 à Paris (La Maroquinerie)

samedi 17 décembre 2016

Left Lane Cruiser : « Beck in black »



Actif depuis une dizaine d'années, le duo Left Lane Cruiser (originaire de Fort Wayne dans l'Indiana) fête le retour au bercail (tout à fait provisoire) du batteur Brenn « Sausage Paw » Beck (remplacé depuis par Pete Dio) qui a choisi les titres, tous issus des premiers albums du groupe, que l'on retrouve remasterisés sur cette nouvelle compilation. 14 plages qui illustrent magnifiquement le savoir-faire de Left Lane Cruiser soit une version âpre du blues, jamais très éloignée du garage rock, animée par une fureur punk sans pareille (cf. « Heavy »), perceptible dans la voix rauque du chanteur Frederick Evans (« Amy's in the kitchen ») ; quelque-part entre Seasick Steve et les premiers Black Keys. La chose prend une toute autre dimension lorsque les titres s'étirent sur la durée, développant une sorte de transe bruitiste (cf. « The Pusher »), les morceaux plus acoustiques apportent une couleur supplémentaire hybride entre punk, blues et country (cf. "Juice to get loose"). Les fans du groupe trouveront de quoi patienter avec les six inédits du tracklisting, les autres auront là la clef pour entrer dans l'univers de cet excellent groupe.

jeudi 15 décembre 2016

Jesse Malin : « Outsiders »



Depuis qu'un soir de décembre 2002, seul sur la scène du Bataclan avec sa guitare folk, il nous avait séduit par son charisme et son sens de l'humour ravageur, on a toujours gardé une affection particulière pour Jesse Malin. Jesse Malin, c'est un peu le dernier de son espèce. Un songwriter inspiré, le genre de mec qui aurait été une superstar en 1972 et qui aujourd'hui vivote dans un relatif anonymat. Un nouvel album de Jesse Malin, c'est un de ces petits plaisirs de l'existence, un bonheur toujours renouvelé, sans (mauvaises) surprises certes, mais toujours égal de qualité ou de talent. Il exhale de sa musique quelque chose de profondément New-Yorkais, intrinsèquement ancré dans la côte est des Etats-Unis. Son sens du storytelling, sa volonté de raconter en chansons le destin de ses contemporains, proche du peuple et des « petites gens » le rapproche d'un Bruce Springsteen (celui des débuts) dont il est le digne descendant (cf. « All bets are off »). Ce nouvel effort voit Jesse se partager entre chansons acoustiques mélancoliques ("Stay Free") et rock n'roll enfiévré (« Here's the situation », « In the summer », les excellentes « Outsiders » et "Whitestone city limits") dont le côté baroque rappelle les Stooges (le saxophone de « The Hustlers » ; « San Francisco »). Signalons pour finir le groove ravageur de « Society Sally », le petit bijou de cette nouvelle livraison. Un classique instantané, gageons que l'album vieillira bien.

mercredi 14 décembre 2016

James Leg : « Blood on the keys »




Fils d'un pasteur Texan (enfin d'après la légende), ancien membre des Black Diamond Heavies, le pianiste James Leg effectue un retour tonitruant avec ce troisième album solo monumental. James Leg, c'est un peu le punk perdu en pleine americana. Un type qui mettrait son énergie, son agressivité même, pour se réapproprier les traditions musicales ancestrales du blues au gospel avec une impressionnante intensité. L'originalité de la chose, vient de l'instrumentation. Claviériste de formation, Leg met son instrument en avant, un clavier vintage, Fender Rhodes le plus souvent, dont il tire des sonorités inattendues. Tout aussi inattendu est le recours épisodique à la guitare, un instrument pourtant indissociable des idiomes précités et qui n'est utilisé ici que ponctuellement, une rareté sur la scène punk. L'accompagnement musical est unique en son genre, groovy mais puissant (cf. la batterie), toujours sur la marge, se jouant avec maestria de la déglingue baroque (les violons de « St Michel Shuffle »). L'écrin est parfait pour la voix grave mâtinée au whisky et à la nicotine de Leg ; cet univers crade lui va comme un gant. Même les morceaux les plus calmes à priori (« I'll take it ») sont consumés par ce feu intérieur. Ecouter cet album c'est comme sillonner les routes du Texas à bord d'une voiture ivre. Un genre de trip halluciné dont on ne revient pas tout à fait indemne.  
En concert à Paris (Petit Bain) le 23 janvier 2017.

mardi 13 décembre 2016

The Haggis Horns : « What comes to mind »



Voici un album qui ne manquera pas de ravir les fans de soul et de funk de tout bords. Formés en 1999 à Leeds, The Haggis Horns s'est tout d'abord taillé une belle réputation en tant que section de cuivres employés, sur scène ou en studio, à tour de bras par toute une kyrielle de super stars : Amy Winehouse, John Legend, Corinne Bailey Rae, Jamiroquai, Morcheeba ou Finley Quaye. Une sorte de Tower of Power british, pour résumer. A l'instar de ces derniers, si vous n'avez jamais entendu parler d'eux, il y a de fortes chances que vous les ayez écoutés sur un album des artistes sus-mentionnés. En parallèle les Haggis Horns ont également réussi à mener leur propre carrière, ce disque étant leur troisième album en nom propre. Alors évidemment avec leur réputation cet effort est particulièrement fort en cuivres et dépote assez sec (ah « It ain't what you got »…) dans un registre soul/funk dansant inspiré des années 1970 (« Keep it tight », assez irrésistible dans le genre) auquel ils rajoutent, ça et là, une pincée de jazz (« Return of the haggis », « Digging in the dirt », « I can't stop the feeling »). Avec une poignée de convives (le bassiste Pete Shand, le percussionniste Snowboy) les Haggis Horns alternent instrumentaux et morceaux chantés par de talentueux invités (John Mc Callum, Lucinda Slim et John Turrell) avec un bonheur égal. Harmonieux et festif, dans un monde parfait, cet album devrait tourner en boucle lors du prochain réveillon du 31 décembre.

lundi 12 décembre 2016

Nick Pride & The Pimptones : « Go deep »




Avec ce nouvel album, le guitariste anglais Nick Pride, une des valeurs sûres de la soul anglaise, franchit une étape supplémentaire. L'arrivée à temps plein de la spectaculaire chanteuse Beth Macari, après un essai sur l'album précédent, a en effet changé la donne. Moins diversifié que par le passé, le groupe se révèle, en revanche, nettement plus consistant et plus constant sur la durée. Oubliant les tentatives funk voire rap de l'album précédent, la formation se recentre sur un son soul vintage tout en prenant soin de varier les ambiances entre titres deep et morceaux plus enlevés. Autant de registres dans lesquels Beth Macari se révèle excellente. L'album ne dépareillerait pas sur le catalogue d'un de ces label hips de Brooklyn et le sextet se révèle prêt à prendre la relève des regrettés Dap-Kings. Rien de moins ! Un album excellent et c'est un petit exploit tant le créneau se révèle encombré par ailleurs. Conseillé.

vendredi 9 décembre 2016

Yasmine Kyd : « Privacy Settings »



Kabyle et Bretonne, Yasmine Kyd poursuit son exploration musicale avec ce nouvel album, se présentant comme une plongée au cœur de la « Great American Black Music » au sens large du terme. Se jouant des étiquettes et des genres, jonglant avec les influences et les époques, ce nouvel album fait cohabiter jazz (« Is it time to go home ? », « Personnal », « Poor heart, poor thing ») et néo soul (« That one day », « Paris jam 69 »). Une variété d'influences qui n'a rien du patchwork disgracieux, grâce à l'élégance naturelle de la voix de Yasmine, caméléon vocal capable d'enfiler tous les costumes sans pour autant perdre sa personnalité et son charme. Vintage sans ostentation, audacieux dans ses arrangements apportant une note de modernité dans son univers rétro, l'album irradie d'une belle chaleur musicale. Sans temps mort ni remplissage, le disque renoue avec la durée moyenne d'un vinyle, transformant l'écoute en un moment à part, suspendu, une petite demi-heure d'introspection dans cet univers classe et cosy.


jeudi 8 décembre 2016

Guillaume Perret : « Free »



Si le jazz est un Atlas, alors Guillaume Perret est son infatigable voyageur. Un explorateur solitaire dans le vaste continent du son. Saxophoniste de son état, Guillaume s'est lancé dans l'enregistrement de son nouvel effort seul. Sans assistance et sans filet, sans groupe pour l'épauler mais avec une multitude d'effets sonores grâce auxquels il donne naissance à des sons stupéfiants, distordus jusqu'à créer l'illusion d'une guitare (cf. « Heavy Dance »). Chercher, inventer et repousser les limites de l'instrument tels sont les objectifs ambitieux fixés par le musicien pour ce nouveau disque. Le saxophone devient une véritable matière sonore que le musicien malaxe, transforme à sa guise, poussant le jazz dans ses derniers retranchements flirtant avec le métal ou l'électro (« Pilgrim »), redessinant ainsi les contours de l'idiome jusqu'à en réécrire l'histoire en creux (le swing revisité et irrésistible de « En good ») passant de l'ombre (« Inside song », "Cosmonaut") à la lumière. En matière de jazz, le terme « free » n'est jamais innocent et peut prêter à confusion. En l’occurrence, il symbolise le parcours d'un musicien libre de créer. Fermez les yeux et écoutez, le périple en vaut la peine.

mercredi 7 décembre 2016

Expo Losing My Stage jusqu'au 31/01/2017 chez Sunlee Howard








Le duo créatif parisien Restez Vivants, a imaginé une série de posters originaux pour illustrer certains concerts restés légendaires des années 1960 à nos jours. Le résultat est à la fois original et épuré, très différent des visuels psychédéliques auxquels on est habitués. 

20 affiches, signées et numérotées, sont en vente en série limitée durant l'exposition.

L'exposition est visible jusqu'au 31 janvier 2017 chez Sunlee Howard au Bon Marché Rive Gauche.





mardi 6 décembre 2016

Janko Nilovic's Supra Hip Hop Impressions



Né en Turquie (Istanbul) en 1941 et naturalisé français en 1973, Janko Nilovic incarne à lui seul une belle idée, multiculturelle, qu'on aime se faire de la France. Spécialiste de la musique à l'image, Janko a sorti des albums instrumentaux par dizaines et à signé de nombreux génériques pour des émissions. C'est également un arrangeur recherché parmi les chanteurs de variété, connu pour son travail avec Michel Jonasz et Gérard Lenorman. Ce nouvel effort, dont le titre est un clin d’œil à son disque « Supra pop impressions » de 1973, a vu le jour après une rencontre avec le deejay et beat maker Dipiz lors d'une émission de radio. L'idée étant de confronter le savoir-faire à l'ancienne du pianiste Janko aux techniques contemporaines et à l'univers futuriste du deejay. Aidé dans sa tâche par quelques musiciens remarquables (notamment le bassiste/guitariste Kofi) le trio accouche d'un album étonnant, comme un fil tiré entre le passé et le présent. Jamais indigeste, le disque symbolise un point de rencontre où des univers différents fusionnent avec grâce et élégance. Particulièrement cinématographique, le programme débute avec « Vox of my soul », titre puissant porté par une guitare à la limite du rock. Un peu plus loin le saxophone jazzy de « Sunny Piece » fait mouche et on avoue une affection particulière pour les funky « This is how we do », « A spy always lie » (la bande originale d'un James Bond oublié) et « My latin thing » qui semble tout droit sorti d'un classique de la blaxploitation remis au goût du jour. Enfin, « Hip hop lullaby » donne à entendre toute la virtuosité de Janko au piano et « No more sorrow » clôt l'affaire sur une note romantique, tendre et rêveuse. L'ensemble affiche une variété d'ambiances telle que l'on peut affirmer sans prendre trop de risques que chacun trouvera son bonheur dans collection riche et variée.


dimanche 4 décembre 2016

Nada Surf, Le Bataclan, 02/12/2016.



Faire comme si de rien était. Oublier la petite boule qui nous tourne discrètement dans l'estomac depuis une semaine. Faire fi de l'émotion qui nous saisit quand on passe devant la plaque hommage aux victimes, le petit pincement au cœur au moment de passer la sécurité. Ce soir on va au Bataclan. Ce soir on va voir Nada Surf. Et, chose impensable, on a même songer à se décommander. Et puis on y est allé quand-même. Parce que la Vie doit continuer, parce que les guitares résonnent plus fort que les kalachnikovs, parce que le rock n'roll fait plus de bruit que les bombes. A l'intérieur, l'endroit a finalement peu changé exception des toilettes et du hall d'entrée, refaits à neuf et du bar qui est semble aussi différent. Et puis dès que les lumières se sont éteintes, on a retrouvé nos marques. Un concert de rock, notre élément naturel. Sur scène, les quatre membres de Nada Surf, se sont bien gardés d'évoquer les événements tragiques survenus il y a un an. Mais on sent bien qu'il y a quelque chose de différent. Que quelque chose à changé. Les applaudissements sont plus appuyés, le groupe (surtout Daniel le bassiste parfaitement francophone) semble ému. Entre les chansons, Matthew (le chanteur au français parfait) évoque des anecdotes personnelles (chose assez rare) et tient un discours profondément humaniste qui fait chaud au cœur… Et ce sont des tonnes d'amour qui se sont déversés sur le groupe via des applaudissements nourris…

Sur scène Nada Surf a toujours été un groupe ultra-efficace, charismatique, emportant littéralement le public et évoluant sur une ligne fine entre mélancolie (« 80 windows », « Weightless » et les chœurs assurés par le public, très émouvant) et puissance brute (« Happy Kid », « Hi-speed soul », rare incursion du groupe en territoire cold wave). Avec l'ajout d'une deuxième guitare, assurée par l'excellent Doug Gillard, c'est un véritable mur du son qui se dresse devant nos oreilles. Derrière sa batterie, le puissant Ira Elliot est le ciment qui tient tout l'édifice debout. Vêtu de son perfecto à paillettes, ce dernier fait la fête dans son coin, danse avec ses baguettes. Cela maintenant près de vingt-cinq ans que ce groupe joue ensemble. Et ce que l'on entend est la résultante de toutes ces années passées ensemble sur la route : une cohésion musicale irremplaçable, une alchimie unique. Ces quatre là savent tout simplement se trouver. Les lumières se rallument, la musique résonne et on pense le concert terminé. Et puis surprise, les quatre sont revenus avec des guitares acoustiques et ont entamé « Blizzard of '77 ». Comme ça, sans amplis, sans micros, au plus près du public. Les quatre voix se mélangent harmonieusement, les harmonies vocales sont magnifiques. Comme un ultime cadeau avant de quitter la scène. Le Bataclan, finalement, on est content d'y être retournés.