vendredi 14 octobre 2016

Interview avec Theo Lawrence


(c) Christophe Crénel
(c) Liah Berlioux
A peine 21 ans, un seul 45 tours et déjà sur la scène de l'industrie à Rock en Seine : tout s'est accéléré ces derniers temps pour Theo Lawrence et son groupe The Hearts. Assis dans l'espace presse du festival et impeccablement gominé le jeune, sympathique et talentueux musicien revient sur son parcours jusqu'ici et ses espoirs pour l'avenir. Rencontre...

(c) Rodrigue Mercier
Bonjour Theo, alors tu es de retour à Rock en Seine, là où ton groupe précédent, les Velvet Veins, a joué son ultime concert. Dans quel état d'esprit es-tu ? Il y a une émotion particulière ?
Théo Lawrence : Et bien, je me sens vraiment chanceux. Très chanceux. J'ai grandi à Paris alors je sais très bien ce que représente Rock en Seine. Cela me fait vraiment très plaisir d'avoir l'occasion de jouer dans ce festival alors que l'on a sorti seulement un 45 tours c'est à dire deux chansons. Je me dis que les étoiles étaient bien alignées (sourire). C'était une magnifique expérience et une scène superbe. J'adore ce festival. C'était très émouvant. Et très motivant pour moi et le groupe. Le contexte est stimulant. Un très beau souvenir.

La dernière fois les Velvet Veins s'étaient produits sur la scène Ile-de-France qui est réservée aux groupes locaux en développement et là tu étais sur la scène de l'industrie, avec les grands si on peut dire. C'est une belle promotion, assez rapide…
Théo : Exactement. La première fois que je suis venu ici c'était avec mes parents en 2010. J'étais venu voir un de mes groupes préférés, j'avais 12 ou 13 ans. Et je me souviens très bien, avoir vu les groupes sur la scène de l'industrie. Cette scène est restée imprimée dans ma tête. Et du coup hier je me suis retrouvé sur cette même scène, je m'en suis souvenu, c'était émouvant.

Un rêve d'enfant ?
Théo : Oui, un rêve d'enfant, absolument. Quand je pense à un festival que j'ai envie de faire en France, je pense à Rock en Seine. J'étais très heureux quand on m'a annoncé la nouvelle. Trop heureux.

(c) Christophe Crénel
Après les Velvet Veins il y a eu une petite période de transition en trio jusqu'à la formation des Hearts. Comment ça s'est passé ? Tu as tâtonné pour trouver la bonne formule ?
Théo : Je savais que je voulais faire mon groupe pour jouer la musique qui me plaisait. Et pour ça il fallait trouver les bonnes personnes. Le solo, c'est bien pour écrire. Quand j'écris mes chansons, chez moi dans ma chambre, je suis toujours seul avec une guitare. Même si j'apprécie d'être en solo sur scène de temps en temps pour une chanson ou deux, ça ne me permet pas de jouer toute la musique que j'aime. Il me fallait des musiciens pour mettre ça en forme. Je les ai rencontrés sur plusieurs années. La période a été assez longue mais quand je les ai trouvées je savais que c'était les bonnes personnes. En fait je n'ai même pas eu à les chercher. Il fallait qu'il y ait de l'amour pour la musique qu'on fait. On a commencé à jouer à trois, puis à quatre et cinq sur un an et demi à peu près. La formation définitive ça fait à peu près un mois et demi qu'on joue ensemble. Le nouveau claviériste vient d'arriver. Maintenant c'est définitif.

Quelque chose m'a frappé hier pendant le concert j'ai retrouvé un peu le son des Velvet Veins, du rock, du blues parfois très ancien, du Delta, et une ouverture nouvelle vers la soul music qui m'a un peu surpris…
Théo : Dans le groupe on est des grands amateurs de soul, on collectionne les disques, depuis toujours on en écoute énormément. Le jour où on s'est tous rassemblés pour faire de la zic ensemble, c'est ce qui est naturellement sorti. Ce n'était absolument pas un choix réfléchi. C'était l'extension de nous cinq réunis. On est très inspirés par les labels à l'ancienne, Stax, Motown, le sud-est américain, la southern soul. On est respectueux de la tradition. Des chansons simples, qui vont droit au but avec des sujets classiques que tout le monde peut s'approprier. Intemporel. Et après on essaye de ne pas être trop orthodoxes non plus. On ajoute d'autres styles qui font que ce n'est pas juste de la soul music. Au sens littéral soul cela signifie de la musique fait sincèrement, de l'âme, du fond du cœur. Donc on aime bien dire qu'on fait de la soul. On se reconnaît dans cette caractéristique. On ne veut pas faire quelque chose de trop passéiste ou référencé au passé même si on en est très respectueux.

Ton chant est aussi différent avec ce nouveau groupe…
Théo : J'ai juste grandi. J'avais 18 ans à l'époque des Velvet Veins. Je viens d'avoir 21 ans, entre temps tu changes de voix. Tu te calmes un peu. Tu t’assagis, tu fais moins d'effets. Avec le groupe d'une manière générale on essaie de rester dans la sobriété et de faire les choses le plus simplement possible. De manière à toucher le plus de monde, même ceux qui n'écoute pas particulièrement de musique.

(c) Dom Secher

Quel est ton rapport avec le Canada aujourd'hui ?
Théo : Je m'en sens très proche, la moitié de ma famille vient du Québec. J'adore le Canada, c'est, jusqu'ici, mon endroit préféré sur terre. Mon parrain est Canadien et m'a beaucoup soutenu dans mon apprentissage musical. J'espère vraiment y tourner bientôt, je n'ai pour l'instant encore jamais eu l'occasion d'y jouer.

Et tes groupes Canadiens préférés ?
Théo : Timber Timbre est un de mes groupes préférés. Neil Young que je respecte infiniment pour sa carrière parfaite de musicien indépendant qui envoie tout le monde se faire foutre. Respect infini. The Band également.

J'ai vu qu'il y avait un voyage de prévu aux USA bientôt…
Théo : C'est le berceau de toute la musique que j'écoute depuis que je suis tout petit. Au-delà de la musique je me suis passionné pour le folklore et le style de vie en général dans le sud-est, le Mississippi. Tout ce que le peuple fait quotidiennement, l'artisanat, la nourriture, la politique, l'histoire en général. Je n'ai jamais eu l'occasion d'y aller, j'étais trop jeune. Maintenant que j'ai 21 ans et que je peux entrer dans les salles de concert, mon premier réflexe a été de prendre un billet d'avion. J'ai envie d'expérimenter empiriquement le lieu, de voir à quoi cela ressemble.

C'est un voyage initiatique…
Théo : Exactement. J'ai l'impression de déjà connaître l'endroit tellement je m'en suis imprégné avec des films, des photos, de la musique. Je suis vraiment obsédé par cet endroit. J'ai hâte...

Quels sont les projets pour le groupe à l'avenir ?
Théo : On rentre en studio pour enregistrer un EP, on espère le sortir pour fin 2016. Et après on a des dates en France pour l'instant. Mais je suis focalisé sur le studio. On a écrit beaucoup de chansons qu'on n'a pas eu l'occasion d'enregistrer. On a envie de faire des disques. On est très prolifiques dans notre manière d'écrire de la musique. J'essaie d'avoir une éthique de travail assez rigoureuse. Tous les jours j'essaie de m'asseoir et d'écrire des morceaux, de sortir quelque chose sur le papier. J'ai toujours mis un point d'honneur à produire sans jamais me reposer sur ce que j'avais déjà fait. Je n'ai pas envie qu'on soit ce genre de groupe qui passe trop de temps à toujours jouer les mêmes chansons et à se reposer sur son passé. Il y a trop de chansons à écrire. J'ai peur de la répétition, je trouve ça chiant pour tout le monde, l'artiste et les spectateurs. J'ai trop de projets dans la tête pour être prudent et sortir un album tous les dix ans. C'est pour ça qu'on privilégie des méthodes d'enregistrement assez rapides, tous en live. On fait peu de prises, on n'a pas le temps d'hésiter. Il faut garder la spontanéité.

(c) Brice Martinat
Propos recueillis le 27 Août 2016 à Rock en Seine.



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