vendredi 28 août 2015

Maïa Vidal : « The Tide E.P. »



Alors que l'on débute l'écoute de l'EP de cette jeune artiste, on plonge de suite dans une ambiance rêveuse. Pop, électro, douce et cotonneuse, bercé par la voix tendre de Maïa, le disque n'est pas sans rappeler l'album de Lorde sorti il y a deux ans. L'ambiance est un peu similaire, sombre mais pas trop, un peu comme un crépuscule ou un levé de soleil quand la lumière chasse la noirceur (« The Tide », « The bed we made »). De cette première livrée de trois titres (complétée par trois remixes) on retiendra surtout « Bones », plus accrocheuse. A suivre...
https://www.facebook.com/maiavidal?

jeudi 27 août 2015

Balthazar : « Thin Walls »



En 2012, le quintet Belge Balthazar a connu un succès immense avec son album précédent « Rats », qui l'a mené sur les routes du monde entier. Depuis, la donne a changée pour le groupe. Fini de se débattre dans les affres de l'autoproduction, ce nouvel effort a été enregistrée en Grande-Bretagne, aux studios Yellow Fish en compagnie du producteur renommé Ben Hillier (Blur, Depeche Mode, Elbow). Ce nouvel album s'intitule « Thin Walls » (murs minces), une référence à l'intimité relative des musiciens tournée ; c'est un titre judicieux et tout trouvé pour un album composé sur la route (une autre nouveauté). Balthazar c'est avant tout un série d'anomalies qui misent bout à bout fonctionnent. Un groupe où le violon occupe part importante des arrangements, faisant au passage de nombreux clins d'oeil au Velvet Underground circa Venus in Furs, et où le chant est partagé entre Marteen Devolder et Jinte Deprez. Au final le disque repose sur un équilibre fragile et délicat, à la fois sombre et lumineux, tirant un trait d'union entre les années 1960 et 1980. La chose nous réserve quelques bons moments de rock (les guitares efficaces de « Nightclub », la baroque "I looked for you") et de pop aérienne (« Wait any longer ») sous influence cold wave. Une belle réussite, le changement leur va plutôt bien.

En concert le 29 Août (Rock en Seine)

Zombie Garden Club



Derrière l'alias mystérieux de Zombie Garden Club, se cache Johnny Douglas, un Canadien exilé à Nashville (Tennessee). Zombie Garden Club est le vecteur par lequel Johnny communique son amour du rock n'roll, du garage et des instruments des années 1960. Et si Johnny n'invente rien, force est de constater que sa passion est contagieuse. Le premier effort de Zombie Garden Club, c'est le genre d'album que l'on connaît par cœur tout simplement parce qu'on prend un plaisir fou à l'écouter. Des guitares bien grasses entre blues et rock n'roll (« Judgment blues », « Evil Baby »), un sens mélodique évident hérité de la pop 60s (« One step, two steps, three steps gone ») qui fait de chaque chanson un petit bijou bien troussé (exception faite de "Calling Andromeda" mièvre et hors sujet). Et, enfin, de l'orgue farfisa pour faire groover la chose (la reprise de « Hey Little school girl »). Mais derrière ces influences ultra codifiées, que l'on retrouve avec un plaisir toujours renouvelé, l'univers de Zombie Garden Club est en fait composé de ramifications larges et insoupçonnées allant du grunge (« Fuzzface ») au rock psyché hypnotique (« Ache of love »). Et le groupe nous épate encore un peu plus avec le swing jazzy "Diamond Daze" qui aurait semblé incongru ailleurs mais passe parfaitement bien ici. Bref quarante années d'histoire du rock n'roll concassées et digérées, avec efficacité et une touchante passion, par Zombie Garden Club pour le plus grand plaisir de nos oreilles. Et à la fin un seul amour subsiste, celui du rock n'roll.
https://twitter.com/zombie_garden

mercredi 26 août 2015

Jaill : « Brain Cream »



Relativement peu connu dans nos contrées, Jaill est un groupe qui attire spontanément la sympathie. Il faut dire que leur univers est plutôt séduisant, intrinséquement californien et fortement ancré dans les années 1960. Contrairement à nombre de leurs pairs de la scène garage, Jaill ne joue pas forcément la carte du boucan à tout va. Même si dans le genre le quatuor se débrouille pas mal, cf. « Just a lovely day » qui ouvre le bal sur d'excellente bases. Mais bien vite, Jaill prend la tangeante pour ouvrir en grand la porte psychédélique (« Got an F », « Slides and slips ») à grandes lampées de synthés cheap. Ailleurs, le groupe s'imagine en héritiers ascétiques de la sunshine pop (« Picking my bones ») tout en réservant une petite place pour une ligne de guitare surf fuzz (jamais désagréable) ou folk. En réusmé, un album qui ne révolutionnera pas le genre, certes, mais qui nous permet de prolonger encore un peu plus l'été d'agréable manière. C'est toujours ça.
http://www.jailljaill.com/

mardi 25 août 2015

Uncle Acid And The Deadbeats : « The Night Creeper »



Groupe culte dans leur Angleterre natale (relire la folle aventure de leurs deux premiers albums par ici), l'oncle acide est de retour avec un, déjà, quatrième effort. Peu à peu l'univers du groupe s'affine pour s'affranchir de Black Sabbath, la figure tutélaire dont ils ont assuré la première partie à Bercy en décembre 2013. L'évolution se fait en douceur. L'amateur d'ambiance noire et interlope sera servi, le groupe évolue toujours en eaux troubles et malsaines. Les tempos sont lourds et obsédants, il y a toujours quelque chose de foncièrement hypnotique chez eux (cf. « Pusher man ») comme une sorte de psychédélisme sombre et inquiétant qui se développe à grands riffs de guitares saturées. Au fil des titres, Uncle Acid s'impose comme la face sombre des Beatles. L'affirmation peut surprende tant il est vrai que, par le passé, on a catalogué, un peu vite, le groupe de revivalistes post Black Sabbath. Sur ce nouvel effort, Uncle Acid ne cache plus son appétance pour les mélodies et la pop sixties (cf. « Yellow moon », « Downtown », « The Night Creeper »). Autant d'influences digérées par le groupe pour un rendu original et excitant : de jolies mélodies jouées sur un mode puissant et métallique, cf. la bien nommée « Melody Lane », quel pied ! A (re)découvrir.
Sortie le 4 septembre 2015.
En tournée française en octobre (La flèche d'or, Paris, le 14 octobre)
http://acidcoven.com/
https://www.facebook.com/uncleacid

lundi 24 août 2015

Quarter Street



La pochette, magnifique, laisse planer l'imagination tout en affichant de manière limpide les intentions du groupe : l'authenticité avant tout. Quarter Street œuvre dans un style que l'on évoque peu sur cette page : la salsa. Chers lecteurs, attention, prenez garde, c'est chaud ! En effet, le groupe ne s'égare guère en route. Pas de dérive jazzy, pas de lissage pop destiné à rendre la chose séduisante aux oreilles des touristes musicaux. Non, Quarter Street joue dur, salsa dura. Les percussions sont folles (« Los golpes enseñan »), la contrebasse vrombit tel un moteur surgonflé, les cuivres explosent et le piano vient pimenter le tout. Bien plus que La Havane, la formation australienne évoque le New York des faubourgs. La musique dégage la rage et la rudesse des rues du barrio dans les années 1970. Ce retour aux racines 70s de la musique n'est pas sans évoquer le travail des labels de Brooklyn en matière de soul music (Truth and Soul, Daptone) dont Quarter Street pourrait bien être le pendant latin. Une curiosité exotique.
Quarterstreet.com
hopestreetrecordings.com/quarter-street

dimanche 23 août 2015

Cécile McLorin Salvant : « For one to love »



Le disque commence par un bourdonnement puis une voix s'élève, prend de la hauteur, l'émotion nous submerge. Le doute n'est plus permis, Cécile McLorin Salvant, américaine de passeport mais de culture francophone (cf. « Le mal de vivre » reprise de Barbara), est une formidable chanteuse et « For one to love » est son troisième album. Dans un monde parfait ce disque sera celui de la consécration pour cette jeune chanteuse de 25 ans. C'est un petit comité, en compagnie d'un pianiste et d'une section rythmique (batterie, contrebasse) qu'a été enregistré ce disque. L'acoustique est douce et chatoyante, la tonalité générale évoque une ambiance nocturne et intime. Ce genre d'ambiance que l'on côtoie souvent mais avec un plaisir toujours renouvelé. Et puis il y a la voix de Cécile. Aérienne (« Left over »), douce et séductrice (« Wives and lovers ») mais aussi d'une puissance émotionnelle insoupçonnée (« Fog »). Une large palette d'émotions à laquelle s'accroche le trio de musiciens qui swingue en accrobates du rythme, toujours sur le fil : « The trolley song » toute en relances ; « Something's coming » un tour de force dépassant les dix minutes ou le magnifique blues « What's the matter now ?». Un fort bel album qui va adoucir notre rentrée...
Sortie le 8 septembre.
En concert le 5 septembre à Paris (Jazz à la Villette)


samedi 22 août 2015

Timo Lassy : « Love Bullet »



Le jazz est une musique universelle et, en provenance directe du nord de la Finlande, le saxophoniste Timo Lassy nous en apporte une magnifique preuve. Car, à l'écoute, rien ne traduit l'origine nordique de la musique. Bien au contraire. La touche « play » enfoncée, le disque nous transporte littéralement. Les images se succèdent. Une rue à la nuit tombée, éclairée à la lumière des lampadaires, qui se reflètent dans des flaques d'eau. Un club en sous-sol auquel on accède par un escalier. Des murs en brique rouge. De la fumée et de l'alcool sur les tables basses. Vous l'aurez compris, le disque est d'un classicisme absolu, le digne héritier des grands classiques des années 1960. Derrière ses atours un peu mystérieux, et sa pointe de mélancolie vénéneuse, « Love Bullet » réussit un petit tour de force : fondre dans sa base hard bop, une pointe de soul (cf. « Green pepper strut ») au détour d'un solo de piano électrique à se damner (« Hip or not »). Sur le morceau titre l'ambiance se fait langoureuse à souhait, la bande son des amours naissantes. Le tout est saupoudré d'influences latines aussi discrètes que séduisantes (« We jazz theme ») et d'orgues dont la chaleur irradie à travers les enceintes. D'une grande variété d'ambiances, le disque peut aussi bien s'écouter seul le soir confortablement installé dans son fauteuil (« Stay Close ») que dans la décapotable en longeant la côte (« Fast Fabio »). Un véritable petit bijou. Remarquable.


vendredi 21 août 2015

Christopher Paul Stelling : « Labor against waste »



L'américain Christopher Paul Stelling fait partie de cette caste de musiciens folk qui s'inscrivent dans une longue tradition entamée naguère par Woody Guthrie. Ces musiciens de la vieille école qui écument les routes, avalent la poussière et qui, soir après soir, remettent l'ouvrage sur le métier. Tout est dit dans le titre : le travail plutôt que le gâchis. Ancrée dans le réel, la musique de Stelling est rustique et âpre. Les amateurs d'arpèges délicats passeront leur chemin. Chez Stelling, le folk se fait rude, rêche. Parsemé d'influences country et blues, Stelling applique au folk au traitement radical et attaque ses cordes comme si il avait un mur du son à disposition (« Horse », "Death of influence"). Il y a du punk en lui, ce qui va particulièrement bien à sa voix grave et profonde, un timbre qui respire le vécu à chaque vers. L'écoute de l'album se révèle ainsi particulièrement intense. Et pourtant, parfois, lorsque Christopher se calme, on trouve un peu de douceur dans sa musique (« Castle »,"Dear Beast") ce qui finit de nous charmer. Un univers singulier et un artiste à suivre.


jeudi 20 août 2015

Interview avec Forever Pavot.



Eurockéennes de Belfort. Il fait une chaleur étouffante en ce début juillet alors que la canicule bat son plein pendant le festival. Confortablement installé (comprendre à l'ombre) au bord du lac, on est heureux de retrouver Emile Sornin, leader de Forever Pavot, qui a illuminé, un peu auparavant, la magnifique scène de la plage de sa pop psychédélique millésimée. Il est vrai que « Rhapsode », le premier album du groupe, avait été un de nos coups de cœur de l'année dernière. Rencontre...

Alors, la plage c'est un endroit magnifique pour jouer, non ?
Emile Sornin : Ah oui ! C'est chouette même si on n'est pas face au lac. Mais c'est assez marrant d'être au-dessus de l'eau. C'est assez étrange comme sensation.

Forever Pavot est-il un projet nostalgique ?
Emile : Oui forcément. On fait souvent référence à une certaine époque que je n'ai pas connu personnellement mais que j'adore voir à travers les films et les BO. Et puis j'utilise aussi beaucoup de vieux instruments. C'est de la musique nostalgique.

Tu es passé de la création en groupe avec Arun Tazieff à Forever Pavot qui est un projet nettement plus personnel. Comment tu décrirais ces deux expériences ?
Emile : C'est complètement différent. Avec Arun Tazieff on faisait beaucoup de jams. On se retrouvait tous ensemble pour répéter et on improvisait beaucoup d'après des riffs qui était trouvés par deux ou trois personnes. On restait des heures et des heures en studio. On enregistrait le tout avec un petit micro et après on réécoutait chez nous. On se parlait beaucoup et on structurait les morceaux ensuite. Forever Pavot c'est moi seul qui compose et enregistre dans ma chambre. C'est beaucoup plus personnel.

On parle souvent de l'influence de la musique de film chez Forever Pavot. Quel film aurait pu être une chanson comme « Le passeur d'armes » ?
Emile : Un peu comme un Claude Sautet je pense. « Max et les ferrailleurs ». Ou un film d'espionnage (sourire).

Il y a un travail un peu particulier concernant les voix et tu chantes souvent de manière un peu fantomatique. Sur « Rhapsode » par exemple la voix est traitée comme un instrument à part entière. Comment tu envisages le chant ?
Emile : C'est quelque chose que j'assume de plus en plus. Au début j'utilisais la voix comme un instrument. J'avais même un peu de mal à m'écouter. Comme beaucoup de gens je pense. On est jamais trop confiant. Cela a pris un peu de temps. L'album a été enregistré sur deux ans. Il y a eu une évolution. Les voix étaient fantomatiques au début et elles sont mieux mises en avant sur la fin comme sur « Joe & Rose » ou « Les cigognes nénuphars » qui est en français et ça aussi c'était nouveau. J'ai plus envie de raconter des histoires maintenant. Avant j'envisageais la voix d'un point de vue mélodique. Comme si j'utilisais un autre synthé ou une guitare en plus.

Il y a un peu de français et beaucoup d'anglais sur le disque. Comment tu juges la qualité musicale de chaque langue ?
Emile : C'est complètement différent. Je viens du métal et du punk hardcore. Le chant en français était assez rare et je détestait ça. Avec le temps, j'ai découvert beaucoup de pop, de variété et de chansons françaises des années 1960/1970 qui me parle énormément. Gainsbourg, Brigitte Fontaine, Dick Annegarn, Bashung... Je n'écoutais pas ça étant jeune, c'est une découverte qui date de ces dix dernières années. J'ai beaucoup écouté de musique anglo-saxonne, même du rap, je ne comprenais rien à ce qui se disait mais cela ne me dérangeait pas du tout. J'y repensais quand j'ai commencé à chanter, en pensant que moi aussi je pouvais utiliser l'anglais comme un dialecte un peu fantôme. C'est très différent mais j'adore les deux.

Un petit mot sur la pochette qui est un peu naïve...
Emile : C'est Catherine Hershey, une bonne amie à moi, qui chante également sur l'album qui en est l'auteur. Elle a été faite aux crayons de couleurs. Ça me faisait penser à des illustrations de vieux contes. J'aime beaucoup. Je voyais très bien sa patte pour ma pochette.

Avant l'album il y a plusieurs 45 tours. Que pense de ce retour à la mode du vinyle ?
Emile : C'est plutôt cool, moi je suis un passionné du vinyle. Maintenant je ne suis pas sur qu'il y ait une telle effervescence autour du support. Finalement ça ne se vendait pas tant que ça. Ça reste et cela restera toujours une niche. Ce qui se vendra le plus c'est le numérique.

Forever Pavot est passé par différents labels. Tu penses qu'il se passe un truc spécial en ce moment ?
Emile : Ces dernières années sont apparus de supers labels indés que j'aime beaucoup. C'est chouette.

Tu te sens à l'aise sur le label Born Bad ? C'est une esthétique particulière qui va bien à Forever Pavot...
Emile : JB (Guillot, le patron du label Born Bad, ndlr) a toujours été fasciné par les trucs un peu bizarres, les BO de François de Roubaix, Francis Bebey, la musique française un peu dégénérée des années 60/70. J'ai découvert des trucs géniaux par le biais de Born Bad. « Le mariage collectif » (un film érotico-hippie danois de 1969, ndlr), par exemple, cette BO (signée Jean-Pierre Mirouze, ndlr) est mortelle, elle a été retrouvée dans des poubelles ! C'est des choses qui m'ont beaucoup influencées. J'y suis parfaitement à l'aise sur ce label ! On partage beaucoup d'influences communes.

Et pour finir, de quel groupe tu aurais aimé faire partie ?
Emile : Aquaserge (rires) !


Propos recueillis le 5 juillet 2015 à Belfort.
En concert à Paris le 29 Août (Rock en Seine)

Jeff The Brotherhood : « Wasted on the dream »



Attention, groupe dangeureux ! A force de tirer la corde dans tous les sens, Jeff the brotherhood, formation hautement sympathique par ailleurs, nous désarçonne. Pas évident en effet de trouver une ligne directrice dans ce nouvel album. Enfin si il y en a une, la guitare. Pour le reste... Est-ce du garage rock, de la power pop ou du metal ? Rien de tout cela et tout en même temps. L'attaque est toujours là, intacte, pas de doute, le duo de Nashville sait toujours envoyer les watts. Le problème viendrait plutôt de ce qu'il y autour, des soli de guitares comme on en avait plus entendu depuis les années 1980 (« Mystified Minds »), la tonalité assez kitsch de l'ensemble (« In my mouth ») ou la flûte (oui vous avez bien lu, de la flûte) de Ian Anderson (Jethro Tull) sur « Black Cherry Pie » qui arrive comme un cheveu sur la soupe. Bref, tout un tas d'artifices masquant un manque d'inspiration flagrant et une écriture plutôt flaibarde (« Karaoke TN », « In my dreams », "Coat Check Girl" sous influence Weezer mal dégrossie). Un album sympathique néanmoins, trois ou quatre titres se chargeant de relever le niveau et se détachant du lot. On s'attendait à mieux.


mercredi 19 août 2015

Refused : « Freedom »



Héros (terme probablement honni par le groupe) punk hardcore des années 1990, les Suédois de Refused mettent cette année un terme à un silence discographique entamé en 1998 avec la sortie de ce nouvel effort intitulé « Freedom ». On le sentait un peu venir à vrai dire. Porté disparu, le groupe avait ressurgi de nulle part en 2012 le temps d'une tournée inoubliable (cf. le concert du Bataclan). La sortie de ce nouvel album, le quatrième du groupe, n'est finalement que la dernière étape officialisant le retour du groupe. Mais cela ne fût pas sans douleur et le guitariste Jon Brännström y a laissé quelques plumes puisqu'il a quitté le quatuor avec pertes et fracas. Ancré dans une époque à jamais révolue, aussi efficace soit-il le mélange techno punk de new noise apparaît aujourd'hui un peu daté, le son de Refused a évolué. Autrefois étiqueté hardcore, Refused est maintenant un groupe rock n'roll. Et c'est plutôt un motif de satisfaction. Le son est clair, tranchant, le groupe ne s'éparpille plus en cherchant des mélanges improbables avec le jazz par exemple. L'accent est mis sur les guitares. Pour résumer ça envoie du début à la fin, le quatuor prend un malin plaisir à nous envoyer des gnons dans les oreilles sans discontinuer, flirtant avec les classiques heavy old school (les cuivres de « War on the palace », « Servants of death »). Le groupe ose même jouer la carte mélodique (le mélange guitares acoustique et électrique de « Old friends/new war ») et le chanteur Dennis Lyxzen met la pédale douce sur les hurlements pour mieux placer sa voix (« Useless Europeans »). Sans temps faible, « Freedom » se révèle être un album cohérent, efficace et consistant œuvre d'un groupe qui n'a rien perdu par ailleurs de sa force revendicatrice (« Françafrique »).
En concert le 1er décembre à Paris (le Trianon).

mardi 18 août 2015

Mavis Staples : « Your Good Fortune EP »



Contrairement à d'autres chanteuses de sa génération qui se posent en gardiennes du temple sacré (cf. Bettye LaVette), Mavis Staples préfère apporter de nouvelles couleurs à son gospel old school. Après avoir beaucoup collaboré avec Jeff Tweedy ces dernières années  (notamment sur le disque posthume de Pops Staples), c'est au tour du producteur électro Son Little d'être invité au bal. Quatre chansons émanent de ces séances deux inédites « Your good fortune », « Fight » ainsi que deux titres souvent associés au répertoire des Staple Singers « See that my grave is kept clean » et « Wish i had answered » présentées dans des versions rénovées. Et le résultat n'a rien d'infamant. Car Son Little a le bon goût de rester assez discret et réussit à se fondre dans l'univers de Mavis plutôt que de transformer cette dernière en queen du dancefloor. Son influence se fait principalement sentir au niveau rythmique. Pour le reste, on retrouve un disque soul/gospel classique mais avec une dynamique contemporaine. Mavis chante toujours merveilleusement bien, et transmets mille émotions au fil de sa voix. Les guitares bleusy sont inspirées, le tout est très prometteur.


lundi 17 août 2015

The Bohicas : « The making of »




Mené par Dominic McGuinness les Bohicas sont, en grande partie, composés d'anciens musiciens de scène d'Eugene McGuinness (le grand frère de Dominic). Difficile à croire, car à l'écoute les Bohicas évoluent dans des eaux assez éloignées de celles de l'auteur de « Chroma ». Nourris au gros son rock US, les Bohicas explosent les compteurs dès le morceau d'ouverture « I do it for your love », le groupe est originaire de l'Essex au nord est de Londres, vraiment ? On les imaginait plutôt répéter dans un garage quelconque au fin fond d'une banlieue américaine (cf. « Red raw » qui rappelle un peu Nirvana sur ses titres les plus apaisés). Ouvertement débridé, les Bohicas lâchent les chevaux (et les guitares!) tout au long des onze titres de cet effort inaugural jusqu'à flirter avec les limites du métal (« Girlfriend », « To die for »). Et c'est dans ce registre que l'on préfère le groupe, quand les chansons s'apparentent à une explosion de décibels, portées par un joie communicative et énergisante (« Where you at », l'urgente « Swarm ») dopées par une batterie en survoltage permanent (« Upside down and inside out »). Cependant, conscient de son statut d'anomalie sur la scène britannique actuelle, The Bohicas intègrent également beaucoup d'éléments mélodiques, typiquement british, afin de modérer le tout. « Only you » est une jolie ballade, pas mielleuse, et le registre convient particulièrement bien au grain de voix éraillé de Dominic. Peut-être pas l'album de l'année, mais ne serait-ce que pour l'électrisante pépite post punk « XXX », le groupe vaut largement le détour. Un premier effort des plus honorables, écourageant pour la suite quand le groupe saura mieux canaliser sa formidable énergie. Sinon la pochette est très cool.
En concert le 21 octobre à Paris (Point Ephémère)
https://www.facebook.com/TheBohicas

dimanche 16 août 2015

Banane Metalik : « The Gorefather »



Entre zombies et gangsters (cf. la sublime pochette), c'est peu dire que les français de Banane Metalik ont développé au fil des années un univers cinématographique singulier, qu'ils ont eux-mêmes baptisé gore n'roll. Soit un subtil mélange entre punk et musique de film orchestrale, quelque chose d'assez inédit pour nos oreilles. Après deux albums, le groupe affine encore son univers sur ce nouvel EP de six titres en forme d'apéritif (sanglant forcément) avant le nouvel album et les âmes sensibles sont priées de s'abstenir. En décalage constant, le groupe s'avère suffisamment irrevérencieux pour faire de la musique du Parrain une cavalcade punk (« The Gorefather ») ou transformer la Poupée de son du duo Serge Gainsbourg/France Gall en Poupée de sang. Agrémentant ses assault punk d'arrangements de cordes (« Gore n'roll clan »), influence directement venue de la musique de film, Banane Metalik possède cette petite originalité qui attire l'oreille et distingue le groupe du tout venant punk, le plaçant directement dans le haut du panier. Le résultat est à la fois excellent et décalé. Vivement l'album !
Sortie le 4 septembre 2015.
http://www.bananemetalik.com/preorder.html

samedi 15 août 2015

Jason Isbell : « Something more than free »



Peut-être bien l'un des secrets les mieux gardés de l'Americana moderne. Cinq albums au compteur et quasiment inconnu de ce côté-ci de l'Atlantique, Jason Isbell, probablement trop américain (hélas) pour l'auditeur français lambda, est de retour avec un nouvel effort en tout point remarquable. Armé de sa guitare folk, Jason nous ballade le long de routes imaginaires, entre poussière et cactus, sous un soleil de plomb et un ciel d'un bleu céruléen. Ses influences vont du folk à la country, avec, lorsque Jason se décide à brancher sa guitare, une note blues ou rock n'roll (« Children of children »), électrique, tout ce qu'il y a de plus agréable Une musique profondément authentique dont les paroles sont ancrées dans les rudes réalités du quotidien. Au petit jeu des influences, on pourrait citer pèle-mêle un Steve Earle assagi ou Gram Parsons. Classique ? Oui dans une certaine mesure, mais surtout d'une beauté intemporelle. La ballade vous tente ? Jetez-vous sur cet album vous ne serez pas déçus...
https://www.facebook.com/jasonisbellmusic

vendredi 14 août 2015

Dimoné : « Bien hommmé mal femmé »



Alors que la musique sort des enceintes, on se rends compte, au fil des titres, que c'est à un bien étrange voyage que nous invite Dominique Terrieu, aka Dimoné, le long de ce quatrième effort. Les textes, sont de prime abord un peu abscons, à double sens, au point que l'on n'est jamais trop sur de ce que l'on écoute. Dimoné à le chic pour nous plonger dans un abîme de perplexité (« Venise »). La langue est utilisée avec une telle liberté qu'elle semble être totalement réappropriée par l'artiste (cf. le titre de l'album) avec quelques détours vers l'anglais (« Chutt chutt shut up ») ou l'espagnol (« Soiñons nos rêves »). Le doute n'est plus permis, Dimoné possède un véritable univers, personnel dans lequel il nous guide par la main. Musicalement la chose est au croisement de plusieurs influences. Si la base reste la chanson, Dimoné infuse dans ses compositions un soupçon de fièvre rock, trahissant son passé punk, au détour de riffs de guitare bien envoyés. Un peu de piment qui le place largement au-dessus du tout venant de la variété et agrémenté d'arrangements baroques (piano jouet ou bastringue). Un chemin assez tortueux dans lequel on croise quelques fantômes, Alain Bashung ou Serge Gainsbourg pour les parties parlées. Original et donc, forcément, digne d'intérêt.


jeudi 13 août 2015

Hot Chip : « Why make sense ?»



Trois ans après leur dernier effort le quintet britannique est de retour. Dans le paysage actuel, Hot Chip fait figure d'électron libre. En effet, le groupe ne semble jamais se contenter ni d'une instrumentation électronique ni de sonorités complètements organiques (la torch song « White wine and fried chicken »). C'est quelque part dans l'entre-deux que la bande menée par Alexis Taylor trouve son bonheur avec suffisamment de bon goût, d'ingéniosité et d'efficacité pour nous faire avaler ce qui apparaît insupportable par ailleurs (le vocodeur, la disco cheap, la house et on en passe). Funky en diable (« Started Right », « Huarache Lights » le redoutable morceau d'ouverture) Hot Chip est pourtant composé d'une bande de grands sensibles (probablement) en manque d'affection. Il en résulte un disque pas aussi festif qu'il n'y paraît de prime abord. A ce titre, le track listing est assez éloquent : « Need you now », « Cry for you » et autres « Love is the future »... Bien plus qu'une simple machine à danser, Hot Chip apparaît au fil des titres comme une formation électro pop, la digne héritière des années 80/90, animée de sentiments à fleur de peau. Hot Chip nous invite à la fête sachant pertinemment que l'on repartira seul, les mains dans les poches, le regard vissé au sol et le cœur brisé.
En concert le 30/08 (Rock en Seine)


mercredi 12 août 2015

Bob Moses : « All in all »



Derrière l'alias trompeur de Bob Moses, se cache un duo Canadien. Sorti à l'occasion du disquaire day (pour la version vinyle) « All in all » regroupe l'intégralité des enregistrements du duo soit deux Eps et un single deux titres, de quoi patienter gentiment en attendant la sortie de leur premier véritable album prévu pour septembre prochain. Dans le paysage des musiques électroniques, Bob Moses se distingue par son écriture. Les chansons, car le groupe se soucie d'écrire de « vraies » chansons, s'articulent autour d'un beat omniprésent, jamais fracassant mais plutôt léger et empreint de mélancolie. La voix traînante, au timbre légèrement soul, participe également de cette sensation un peu neurasthénique. C'est sur la longueur que la musique de Bob Moses s'exprime le mieux, dépassant régulièrement les cinq minutes, Bob Moses entraîne l'auditeur dans une spirale sombre et hypnotique grâce à la répétition fréquente des thèmes. A n'en point douter c'est une écoute nocturne et solitaire qui sied le mieux à Bob Moses, bien loin des dancefloor enflamés. Bob Moses invente plutôt la bande son d'après la fête, quand les lumières sont éteintes et les danseurs rentrés chez eux. Enfin, la version acoustique de « Hands to hold », avec une simple guitare folk pour accompagnement, soit à l'opposé exacte du reste de leur production, prouve que Bob Moses peut explorer la même gamme de sentiments avec une instrumentation organique. Voilà bien la preuve que le duo place la musicalité et l'écriture au cœur de sa démarche.
http://bobmosesmusic.com/

vendredi 7 août 2015

Fiona Walden + Bikini Machine, Festival Vers les arts, Saint-Hilaire-de-Riez, 6 Août 2015

Dans la grosse armada à laquelle ressemble parfois un festival d'été, Vers les arts fait un peu figure d'exception. Un festival gratuit, à taille humaine, rafraîchissant par son apparente simplicité et son côté humble. Le site est magnifique, placé en lisière de la foret, les jeux de lumière et autres éléments décoratifs plongent le spectateur dans un univers onirique où la fantaisie règne. Pas uniquement centré sur la musique, Vers les arts donne l'occasion pendant trois jours de découvrir de nombreux spectacles, du théâtre de rue au nouveau cirque, où toutes les générations se croisent. Et après 22 heures, lorsque les familles sont parties, les concerts commencent et on envoie le son sous le chapiteau. 

On commence avec la toute jeune Fiona Walden qui a sorti son premier EP un peu plus tôt cette année. Curieux mélange que la musique de Fiona. Tout semble partir du rock et de la new wave, influences premières que la jeune femme se charge de propulser dans le futur en intégrant dans l'ensemble une guitare aux intonations country/western et une dynamique électro tout à fait contemporaine. Mais c'est au final la voix de Fiona, grave, rauque et pour tout dire assez masculine qui étonne, surprend et, finalement, séduit. C'est arrivé à la fin de son set que sont balancés les titres les plus costauds, on n'est plus très loin alors d'un mini Black Strobe. Hélas, le projet souffre un peu dans sa représentation live du manque de musiciens. Pas évident de retranscrire une telle richesse sur scène à deux (Fiona et son guitariste). Un groupe au complet rendrait le concert encore plus passionnant mais il s'agit toutefois d'une très belle découverte.

Changement d'ambiance par la suite avec le sextet Bikini Machine, un groupe dont on avait perdu la trace depuis environ cinq ans. Originaire de Rennes, Bikini Machine fait partie de la fine fleur du rock n'roll d'ici, le genre de groupe a ressortir les amplis hiwatt. Au départ donc Bikini Machine était donc un pur groupe de rock, racé possédant une force de frappe admirable d'un point de vue rythmique. Mais l'intégration d'un deuxième clavier d'appoint, aux interventions aussi ponctuelles que judicieuses, a changé la donne orientant la chose vers plus de psychédélisme sans jamais renier tout à fait les racines rock, fortement ancrées dans les sixties et le rock garage, du groupe. Aussi efficace en Anglais que dans la langue de Molière Bikini Machine évoque aussi bien le Jacques Dutronc des sixties que les Sonics et autres Seeds. Excellent.

lundi 3 août 2015

FFS



Depuis quelques années, l'alliance entre artistes est devenue monnaie courante (cf. Elton John et Leon Russell, Elvis Costello et The Roots etc...) le temps d'un album commun. Dans un registre beaucoup plus pop c'est aujourd'hui Franz Ferdinand et les Sparks qui unissent leurs forces derrière l'alias FFS. Plutôt bien pensé ce mariage entre le savoir-faire rythmique des ex-jeunes loups écossais et le grain de folie kitsch propre aux survivants des 70s. On pouvait s'en douter, la rencontre fait des étincelles, le choc des générations a bien lieu, et donne naissance à de petites perles pop qui rivalisent d'énergie (cf. l'excellente « Dictator's son », la dansante « The man without a tan », « Police encounters », « Save me from myself »). A contrario, le duo brille aussi dans le registre opposé mid tempo délicat et (un peu plus) sombre (cf. « Little guy from the suburbs »). D'une manière générale, l'album est très marqué par le son des synthés des Sparks qui prend beaucoup de place (l'électro pop 80s « So Desu Ne ») au détriment des guitares réduites à un rôle rythmique. Au final tout le monde est gagnant, Franz Ferdinand montre sa capacité d'évolution et les Sparks, un peu oubliés de ce côté-ci de l'Atlantique, reviennent sur le devant de la scène. « Collaborations don't work » clôture le disque sur une note sarcastique et pleine d'humour.
En concert le 28 Août (Rock en Seine)

samedi 1 août 2015

Space Captains : « Seen from the moon »



Acteur récurrent de la scène blues/soul hexagonale, Damien Cornelis a succesivement mis ses claviers au service de l'harmoniciste Greg Zlap, du Blues Power Band ou plus récemment de Malted Milk. Après ces années de formations Damien présente son projet personnel, Space Captains dont cet EP de six titres est la première sortie. Et surprise, le résultat est très différent de ce à quoi le musicien nous avait habitué jusqu'içi, beaucoup plus funky, et l'ombre de Stevie Wonder plane sur le clavinet fréquemment utilisé par le musicien. L'écriture étonne, assez déconstruite, tout en ruptures et en relances, en forme de clin d'oeil à Sly and the family stone. En compagnie de son frère Jérôme et de quelques compadres croisés ça et là (Toma Milteau, Greg Zlap, Arnaud Fradin, Hervé Joachim etc...) Damien varie les plaisirs tout en versant un bonne louche de piment funk dans la soupe. « Be Cool » est un blues plutôt réussi, « New Orleans » un hommage cuivré à la Cité du Croissant (James Copley d'Electro Deluxe au chant) alors que « Space Captain » et « Soul Food » (Juan Rozoff derrière le micro) lorgnent vers le funk électro des années 1980. Qu'importe le flacon pourvu que le groove soit au rendez-vous, c'est un peu le leitmotiv de cet attachant projet.