dimanche 29 juin 2008

Michael Powers, Terra Blues Club, New York City, 16 juin 2008.





Il y a quelques mois, grâce à la lecture, toujours passionnante, du magazine Soul Bag, j’ai appris l’existence de Michael Powers, l’un des meilleurs bluesman en activité à New York City. Sachant que j’allais bénéficier de quelques jours de « vacances » (est-il possible de prendre des vacances et du repos à NYC ?) dans la big apple, je m’empressais de noter l’adresse du Club ou Powers se produit régulièrement, le Terra Blues Club et de vérifier le tout en ligne…

C’est donc comme ceci que l’histoire a commencé. Elle s’est terminée, outre-Atlantique, par une longue marche à pied à travers Manhattan et les quartiers du theater district et de Chelsea, pour finalement arriver à Greenwich Village, là ou se trouve le Terra Blues, là ou jadis, dans les années 60, battait le cœur jazz et folk de New York, dans le sillage de Bob Dylan et de Karen Dalton.

Greenwich Village, c’est un village au cœur de la mégalopole, c’est à la fois vert, calme et reposant quand on sort de l’agitation proprement affolante de Times Square. Le touriste se fait plus rare et c’est ici qu’on réalise qu’une vie à New York ne se résume pas à une horde de businessmen qui toisent la foule d’estivants. La vie y semble bohème, on trouve des boutiques de disques, d’instruments, de fringues, le tout est « vintage ». Et puis, il y a des bars et de la musique un peu partout…

Pour ce qui sera, hélas, ma seule soirée de libre, je m’arrête donc à Bleecker Street, où est sis le Terra Blues, qui est, comme me le confirmera le propriétaire des lieux, le dernier véritable club de Blues à Manhattan, c’est ainsi, les choses changent, parfois pas dans la direction désirée… Une fois la porte du club poussée, j’ai compris ce que j’étais venu chercher et pourquoi cela valait la peine de se donner tant de mal. L’atmosphère est intime, on se sent rapidement à l’aise, l’endroit est plutôt sombre, des bougies trônent sur les tables. L’accueil est chaleureux, la serveuse charmante à tout point de vue.

Seul petit point noir, le show tarde à commencer, la faute à un orage aussi soudain que violent qui s’est abattu sur Manhattan, provoquant des embouteillages sans fin, dans lesquels est coincé Michael Powers qui arrive avec une bonne heure de retard puis par un ampli récalcitrant qui provoque chez Michael un profond soupir : « Oh Boy ! Gimme strenght… » (Donnez-moi la force…).

Accompagné par son bassiste sur quelques morceaux ou seul à la guitare folk ou électrique, Powers fascine dès son entrée en scène. Un jeu de guitare percutant, une voix chaude et profonde, de bonnes compositions. Son blues est très fortement teinté de rock 60s comme le prouve ses reprises (sur disque) de Jimi Hendrix, Count Five, Love et de folk de la même époque, il reprend également Bob Dylan et Leonard Cohen. Pour ses compositions personnelles, Michael s’inspire souvent de ses voyages avec de très beaux instrumentaux dédiés à Madrid et à la magnifique ville d’Istanbul (que j’ai eu la chance de visiter il y a un an).

« Il y avait un gars, qui était là vendredi dernier, un Français. On essaye de monter une tournée en Europe, de venir faire quelques festivals ». Jusqu’à présent, Michael Powers n’a jamais eu trop l’occasion de venir faire un tour de ce côté-ci de l’Atlantique, à l’exception de quelques concerts en Italie et en Finlande. Espérons que cela change bientôt, car il mérite vraiment d’être découvert. D’ici là, il vous faudra traverser un océan pour avoir l’occasion de le vérifier par vous-même. Il occupe la scène du Terra Blues club tous les lundis en acoustique à 19 heures ou avec son groupe, Michael Powers Frequency, le vendredi pour le set électrique de 22 heures.

http://www.michaelpowers.com/
www.myspace.com/powersblues
http://www.terrablues.com/

jeudi 26 juin 2008

BAD NEWS



Retour de vacances particulièrement pénible cette année, tant les mauvaises nouvelles se sont accumulées en quelques jours.

J’ai tout d’abord appris, lors de mon séjour aux Etats-Unis, le décès de Buddy Miles, survenu le 27 février dernier, parti dans une indifférence générale aussi cruelle que choquante. Principalement connu pour avoir été le batteur du Band of Gypsys, le groupe post-experience de Jimi Hendrix, Buddy Miles avait également joué avec Carlos Santana (un album live en 1972). Mais Buddy Miles était bien plus qu’un batteur, aussi excellent fût-il. Multi instrumentiste, bon guitariste, doté d’une voix « soulful » à l’extrême, il avait également gravé, seul ou avec son groupe Buddy Miles Express, une poignée d’excellents albums : « Expressway to your skull » (1968), « We’ve got to live together » (1969) et son chef d’œuvre « Them Changes » (1970). Buddy était un batteur puissant mais funky, l’un de ceux qui ont un jour donné l’envie, folle, à l’auteur de ces lignes de s’installer à son tour derrière le kit. Rest in Peace, Brother…


Danny Federici, organiste du E Street Band, le groupe de Bruce Springsteen, nous a quitté le 17 avril 2008 emporté par une longue maladie, qui l’avait déjà empêché de se produire avec le Boss à Bercy en décembre dernier.

Ellas McDaniel, a.k.a Bo Diddley, pionnier du rock n’roll, inventeur d’une fameuse guitare rectangulaire qui restera dans les annales et parangon d’une certaine « sauvagerie » musicale, inspiratrice de dizaines de vocations, Bo Diddley donc a succombé à une crise cardiaque. Il avait 79 ans.

Et enfin, dernier membre de cette sombre et tragique litanie, Nikola Acin, le journaliste de Rock n’Folk, nous a quitté le 10 mai dernier. Nikola a, plus d’une fois, crié son amour d’Elvis, du Clash, de Bob Dylan mais aussi des Stray Cats et de Brian Setzer que ce soit dans ses articles ou dans les Hellboys, le groupe dont il fût le chanteur et guitariste…

Comme vous le voyez, cela fait beaucoup sur une période aussi courte. On se retrouve très vite, dans de bien meilleures dispositions…
Band of Gypsys : "Them Changes" :


jeudi 5 juin 2008

Can’t you hear me knocking ?

Avant de partir en vacances (bien méritées), je vous ai préparé une playlist, à mon humble avis, aux petits oignons ! En tout cas, voici les MP3 de mes vacances. Can’t you hear knocking on your window ?

1) Jill Scott : The Way (live)
Extrait de la bande originale du film/concert/documentaire Block Party (à voir d’urgence si ce n’est pas déjà fait) voici une version live du tube « The Way » de Jill Scott, à mon avis encore meilleure que celle figurant sur le récent album live de la miss. Jill Scott nous pose içi LA question : « Is this the way you love me, Baby ? ». Est c’est comme ça que tu m’aimes, Bébé ? Et je connais plus d’une fille, pas spécialement heureuses en la matière, qui se posent cette question quotidiennement. Evidemment, je pense très fort à elles. Ce n’est peut-être pas grand-chose, mais moi je vous adore. Cette chanson est pour vous…

Jill Scott : "The Way"

2) Jill Scott : Golden (live)
Toujours extrait de la BO de Block Party, voici « Golden » le premier tube de Jill Scott et son extraordinaire revirement jazzy en plein milieu de la chanson. Jill est ici accompagnée (comme sur la chanson précédente) par The Roots. Alors autant vous dire les amis ça déchire !

Jill Scott : "Golden"


3) The Sweet Vandals : « I got you man ! »
Petite bombe soul-funk en provenance de Madrid. La dernière trouvaille du label Differ-ant (Nicole Willis). Une excellente chanteuse, Makya Edjole, accompagnée par un gang de teigneux prêts à se jeter corps et âmes comme la misère sur le monde. Un son assez sale, j’adore.

The Sweet Vandals : "I got you man"


4) The Sweet Vandals : « Runaway People »
Obscure reprise pour nos amis espagnols. Attention aux brûlures c’est chaud comme de la braise. Que Calor !

The Sweet Vandals : "Runaway People"


5) Wraygunn : « Don’t you know ?»
Restons sur la péninsule ibérique un instant. Les portugais, originaires de Coimbra, de Wraygunn sont l’un des groupes qui m’ont vraiment scotché ces dernières années. Tout un agrégat d’influences rock n’roll, soul, blues et gospel se mélangent ici avec une rare maestria, un son de guitares assez roots, des scratches, cet album au titre biblique « Ecclesiastes 1.11 », est un chef d’œuvre en puissance.

Wraygunn : "Don't you know"



6) Wraygunn : « There but for the grace of god go i »
Reprise, débordante de sensualité, du tube disco de Machine. La chanteuse Raquel Rahla est ici en état de grâce.

Wraygunn : "There but for the grace of god go i"


7) Little Barrie : « Just wanna play »
Le trio Little Barrie est l’un des groupes les plus cool à l’heure actuelle en Grande-Bretagne, bien plus en tout cas que toute cette bande d’ados montés en épingle grâce à myspace. Voici donc un mélange rock n’roll, groove et swing. Et un très bon batteur.


Little Barrie : "Just Wanna play"




8) The Noisettes : « Cannot even (Break free) »
Dans la lignée des BellRays, voici le trio anglais The Noisettes, mené par la chanteuse Shingai. Le morceau commence par un rythmique jazzy qu’ils se font ensuite un plaisir de lacérer à grands coups de guitare…


The Noisettes : "Cannot Even Break Free"


9) The Dirtbombs : « Livin’for the city »
Reprise du classique de Stevie Wonder par une bande de cintrés venus de Detroit. Vous êtes prévenus, ça arrache !

The Dirtbombs : "Livin for the city"


10) Shake your Hips ! : « High on the hog »
L’un des meilleurs groupes de blues en France, la guitare rythmique semble échappée de « Payback » de James Brown.


Shake Your Hips ! : "High on the hog"





11) Blues Power band
Titre éponyme d’un autre excellent groupe de blues hexagonal. Un son unique limite disco.


Blues Power Band





12) Gossip : « Dark lines »
Et si au cœur de la tornade disco/punk/soul Gossip, il y avait tout simplement des « Mangled Hearts » (des cœurs estropiés), des âmes en souffrance comme en témoigne ce poignant « Dark Lines »…


Gossip : "Dark Lines"




13) Silent : « Poison »
Le duo électro s’attaque ici au funk, scratches à l’appui. Et une batterie en filiation directe avec les Meters. Ca vaut le coup d’être écouté…

Silent : "Poison"





14) Pamela Hute : « Parachute »
Une petite sucrerie pop pour la française Pamela Hute, qui est en ce moment en plein enregistrement de son premier album
Pamela Hute : "Parachute"

15) Stevans : « Monday’s wedding »
Et pour finir une dernière petite gourmandise pop acoustique, signée du trio Suisse Stevans.








Stevans : "Monday's Wedding"
Remerciements : Pamela Hute, Yvan (Stevans), Frank et Nico (Silent), Hervé (Blues Power Band), Jean-Marc (Shake Your Hips !)

mardi 3 juin 2008

Blues Power Band


Attention, talent ! Blues Power Band, BPB pour les intimes, (voir mes messages des 16 mars et 2 avril) est l'un des trésors cachés du blues en France. Faisons un peu mieux connaissance...


1) Comment est né le groupe ?
Hervé "Bannish" Joachim (chant)
: C'est une longue histoire ! Pour la faire rapide, à l'origine on trouve Paco et Bannish. puis papygratteux s'est vite adjoint au band. Nico et Bathus forment la section rythmique depuis 4 ans.


2) Ce qui est frappant, c'est la cohésion entre vous, jouez-vous ensemble depuis longtemps ?
H.J
: Nous jouons tous les cinq ensemble depuis 4 ans. Etre unis comme les doigts de pied est un peu notre marque de fabrique, même si nous sommes tous les cinq très différents, dans nos parcours, nos tempéraments, nos personnalités. C'est peut-être grâce à ces différences que nous sommes si complémentaires, et que avons beaucoup de plaisir à évoluer ensemble.


3) Vous avez un son assez particulier, parfois limite funk. Cela me rappelle un peu l'album "Blow by blow" de Jeff Beck...
H.J : C'est une question qui nous est souvent posée, et en fait, il est difficile pour nous de répondre. Car nos influences sont tellement larges et différentes que c'est une sorte d'alchimie qui s'opère sans que l'on revendique spécialement telle ou telle influence. Disons quand même tout le blues, tout le rock et tout le funk.


4) Dans une précédente interview, les Shake your hips avaient évoqué la difficulté de vivre du blues en France, où en êtes-vous, vous ? Est-ce que vous vivez de la musique ?
H.J
: On comprend bien ce que nos potes des SYH veulent dire ! mais ce n'est pas le lot du blues uniquement. On le sait bien : pas de réelle chance de bien vivre de la musique sans grosse promo. Si la musique était un gateau, je dirais qu'il est devenu très gros, mais que les parts sont réservées aux quelques artistes marketés ! donc, pour les miettes, on trouve quelques RMistes de la musique et plein de mecs qui jonglent entre la musique et un boulot alimentaire. Après, c'est un choix : pour certains, les cachets ou autre statuts suffisent pour vivre, pour d'autres, ça suffit pas. Mais tous aspirent à pouvoir se consacrer 100% du temps à la musique en espérant qu'un jour ils en vivront bien ! BPB n'échappe pas à la régle : il y a parmi nous les deux choix de vie...


5) Le groupe est assez spectaculaire sur scène. La scène est-elle un exutoire pour vous ?
H.J
: C'est plutôt une façon de concevoir le show. On a aimé les groupes qui donnaient de la vie, de l'énergie ou de l'émotion sur scène. On ne concevait donc pas de faire un truc plan-plan (genre chiant), ou des trucs qui se veulent pseudo-poético-politico-intellectuels (le ridicule ou la vanité ne sont jamais loin !). Le blues et le rock appellent à partager des trucs simples entre des musiciens et un public qui veulent juste passer de bons moments tant qu'ils sont encore vivants !!! Notre façon de jouer et notre son invitent à quelque chose de direct et convivial, au pestacle koi.


6) Etes-vous déjà allé à Chicago ?
H.J
: Si on a déjà connu les destinations lointaines (tournée en Chine en 2005), on a jamais joué à Chicago. Mais on est plusieurs à s'y être déjà rendu pour y sentir l'atmosphère hyper-urbaine sans être jamais oppressante. On a évidemment fait le tour de tous les juke-joints et autres clubs de blues qui sont autant de pélerinages o-bli-ga-toires...mais bon, avec un peu d'imagination, on peut aussi jouer à Ivry-sur-Chicago, Saint Chicago-sur-Loire ou Chicago-les-deux églises.

Propos recueillis par email le 3 juin 2008.
Et un grand merci au groupe pour sa gentillesse et sa disponibilité.

Blues Power Band : "Reverse side Blues"

http://www.bluespower-band.com/
www.myspace.com/bluespowerband

lundi 2 juin 2008

Empyr : The peaceful riot




La trajectoire d’Empyr ne ressemble en rien à celle, classique, d’un jeune groupe français. Composé, pêle-mêle, d’anciens membres de Pleymo (l’excellent bassiste Benoît Julliard), Watcha (le guitariste Frédéric Duquesne), Vegastar (le batteur Jocelyn Moze) et Kyo (le chanteur Benoît Poher et le guitariste Florian Dubos), Empyr se retrouve dès son premier album signé sur une major, Sony, et ledit album a été enregistré à Los Angeles sous la houlette du producteur Ken Andrews. Alors évidemment, le nom qui fâche a été lâché un peu plus tôt : Kyo, les rois de la teenage pop, déguisés en groupe néo métal, groupe particulièrement anecdotique s’il en est. On se souvient encore d’eux jammant avec Johnny Hallyday ou bien encore du chanteur Benoît Poher prenant des cours de chant à la Star Academy. Tout ceci est bien éloigné de la thématique habituelle de ce blog.

Pourtant, il faut donner une chance à Empyr. La trentaine arrivant, les membres d’Empyr, ont ce privilège de l’age, il faut bien qu’il y en ait un, la maturité. The Peaceful riot est un album beaucoup plus sombre que tout ce que Kyo a pu enregistrer auparavant, plus proche du Pleymo de la fin. Enregistré intégralement dans la langue de Shakespeare, le thème du nouveau départ se tient du début à la fin du disque et se retrouve dans les titres des chansons : « new day », « birth »… Et il convient également de rendre justice au chanteur Benoît Poher, qui a une belle voix, capable de monter assez haut dans les aigus, tout en restant mélodique, et qui hurle aussi très bien dans le mike. C’est d’autant plus agréable que le garçon a, enfin, trouvé autre chose que des histoires d’amour ado à chanter. Quant à la musique, ses comparses lui tissent une toile plutôt métallique qui n’oublie pas pour autant la mélodie. On n’est dans le fond pas très loin de Tool, mais en plus accessible. « The Peaceful riot » donne d’emblée une stature internationale à Empyr, ce qui est peut-être ce qui peut leur arriver de mieux, l’ombre de leurs anciens groupes, étant un peu lourde pour la France.

http://www.empyrmusic.com/
www.myspace.com/empyrmusic




Empyr "New Day" Clip (Réalisé par Mark Maggiori, ex chanteur de Pleymo)
by yan202


dimanche 1 juin 2008

Silent


Silent, le « duo aphone », retrouve la voix le temps de répondre à quelques questions. Les traits sont tirés :

Frank (machines) : On a répété hier soir jusqu’à plus de dix heures et demi dans notre appart…
Nico (batterie) : On habite ensemble le même appart
Frank : Ouais la piaule plutôt : 8 mètres carrés

Vos voisins n’ont rien dit ?
Frank :
Non, on a répété en formation tout électro (sans batterie avec uniquement des claviers)
Nico : On a de toutes petites enceintes
Frank : Ca ne fait pas tellement de bruit… (Bâillements) Quand on rentre je me mets sur « Wendy »…

C’est qui Wendy ?
Frank (confus) : Non, non, c’est une chanson…
Nico : Ca peut prêter à confusion.

Comment vous êtes vous rencontrés ? Dans les années 90, la grande mode c’était de trouver l’autre moitié du binôme chez un disquaire ? Est-ce que vous vous êtes rencontrés dans une boutique de disques ?
Frank :
On n’a pas commencé comme un duo électro, on était dans un autre groupe à l’époque qui s’appelait RAN. Un groupe rock vraiment rock, rock, rock…
Nico : Un groupe indus.
Frank : J’ai rencontré Nico par le biais de Julien qui était le guitariste.
Nico : Je venais de rencontrer Julien, on commençait et on cherchait un chanteur.
Frank : Ils m’ont appelé et au fur et à mesure on a intégré des machines, de l’électro dans le son de Ran. On a sorti deux EPs et un album, sans vraiment percer et ça a un peu cafouillé sur la fin…
Nico : Ouais, c’est des histoires de groupe…
Frank : Et on s’est vite rejoint avec Nico sur Silent.
Nico : Et on a même joué Silent pendant un an et demi, deux ans pendant qu’on était avec RAN. On a même fait les premières parties de nous-mêmes. C’était ça nos premiers concerts avec Silent. On ouvrait quand on était en tournée avec Ran, on faisait un petit set avant…
Frank : Genre, 25 minutes.
Nico (nostalgique) : Et donc c’était… (silence). Il y a longtemps, quoi…
Frank : Une dizaine d’années.
Nico : Un peu plus même…
Frank (soupir) : Ca nous rajeunit pas… Je me rappelle j’avais 19 ans…

Quel a été le parcours du groupe jusqu’à l’album/coffret Listen ?
Frank :
Après RAN, j’étais sur Lyon, Nico sur Paris.
Nico : Il y a eu un moment de flottement, où vraiment ça allait tout doucement.
Frank : On composait chacun de notre côté…
Nico : On en discutait plus qu’on ne jouait. Et puis ça nous a piqué (il insiste) vraiment l’été dernier. Je sais pas, peut-être qu’on avait envie de jouer. Notre entourage nous a aussi pressé : « Il faut sortir quelque chose, c’est le moment, se bouger les fesses et tout ». En fait c’est venu naturellement.

Combien de temps a duré l’enregistrement ?
Frank : Pas longtemps. En fait on a enregistré au mois de Juillet l’année dernière. On a commencé a mixé mi Août. Après on a mis tout ça de côté pendant trois mois. Je suis rentré sur Besançon (leur ville d’origine, NDA) et on s’est remis à mixer mi-janvier. L’album est sorti en mars. Ca été assez vite.

Il y a quatre CD avec des ambiances assez différentes, est-ce qu’on peut considérer qu’il y a quatre périodes distinctes ?
Nico : Il y a quand même ça. Certains morceaux sont bien plus vieux que d’autres.
Frank : Par exemple Oneseq a été composé quand Ran existait encore en 2004, CAC 40 en 2005. Le dernier volet Inact en juillet dernier. On a décidé de sortir les quatre CD ensemble avec le packaging séparé. On ne pouvait pas se permettre, vu les ambiances différentes, de tout mettre sur le même disque.
Nico (il approuve) : Ca retraçait un peu tout.
Frank : Sortir les quatre ensemble retrace l’histoire de Silent. Et ça montre bien notre évolution.

Dans l’absolu, y a-t-il des chanteurs ou chanteuses avec qui vous aimeriez collaborer ?
Nico
: Qu’on aimerait enregistrer plutôt. Par la suite, on aimerait bien bosser avec du monde.
Frank : Intégrer des featuring.
Nico : Pas uniquement du chant. Un flow hip-hop…
Frank : Mais traité. Pas une voix naturelle.
Nico : De toute façon, on n’est pas dans le songwriting pur et dur.
Frank : Ca se fera en fonction des rencontres. Pamela Hute par exemple.

Vous parlez d’intégrer plus d’éléments « live », des instruments…
Nico
: Pas forcément sur scène, ça devient vite compliqué. Ou alors dans notre dans notre fief de Besançon…
Frank : Pour notre dernier concert, il y avait Etienne.
Nico : Le DJ qui a fait les scratches sur Poison.

Et en studio ?
Frank : C’est toujours intéressant de travailler avec d’autres personnes dans tous les cas.
Nico : C’est même prévu. On avait deux, trois idées : guitare, platine…
Frank : Même un bassiste. On est hyper ouvert pour collaborer avec plein de gens. C’est ce qui est intéressant dans ce métier. Et puis on n’est que deux. Il y a de l’espace pour accueillir d’autres artistes.

Pour en revenir à l’album, est-ce qu’il est difficile de trouver des titres pour des instrumentaux ?
Nico :
De les nommer ? Non.

Vous partez d’une émotion, d’un truc en particulier ?
Frank
: Souvent on part d’un sample de voix. Dans Poison, ce n’est pas très distinct, mais il y a une voix qui répète Poison tout le long du morceau. On ne cogite pas trop sur les titres.
Nico : C’est plus une affaire de couleur.

Pour en revenir aux titres, sur votre myspace, on peut lire « Silent ne dit rien », or il me semble que certains titres comme CAC 40 ou Politik sont évocateurs…
Frank
: C’est vrai, il y a un thème qui se tient tout le temps. Je pense que c’est un « arriéré de chanteur ».
Nico : C’est les restes de Ran. Qui n’était pas un groupe spécialement engagé mais…
Frank (il enchaîne) : …assez critique quand même.
Nico : Un peu fataliste. Forcément un peu influencé par beaucoup de choses qui ne vont pas bien.

Un peu amer ?
Nico
: Oui, voilà.
Frank : On avait d’ailleurs un titre qui s’appelait Amer dans Ran.
Nico : Du coup ça se ressemble, mais ça n’est pas la même démarche. C’est toujours cette histoire de « restes » mais on a quand même une démarche…
Frank (il enchaîne) : Une démarche moins « dénonciatrice » je dirais. C’était quand même un peu ça, fataliste.
Nico : Ran, c’était un constat.
Frank : Maintenant, le constat, on ne le fait plus par la voix. Juste par le biais de la musique, mais on essaye de garder des titres qui sont dans la même logique.
Nico : On n’y réfléchit pas vraiment, c’est en nous. Mais on a toujours envie de dire les choses, mais on n’a plus de chant. La démarche est plus musicale.
Frank : Si au bout de compte on n’a plus de chanteur « à texte » avec une pensée sur la société ou ce qu’on veut, c’est pour moins « scotcher » le public.

Pour laisser plus de place à l’interprétation ?
Frank
: Oui, pour que le public se laisse prendre par le son. Danser, tout simplement. Plutôt que de regarder un chanteur charismatique qui va clamer haut et fort « fait chier c’te chienne de vie ».
Nico : C’est ce que j’allais dire, on a une approche plus artistique, moins engagée, plus musicale.
Frank : T’es ici pour te faire plaisir, pas pour t’en reprendre une couche. Pas pour te prendre la tête, rentrer de ton concert en te disant : « effectivement, fais chier la vie ».

Frank, est-ce que tu penses qu’on peut tout jouer, tous les styles de musique, avec des machines ?
Frank
(pensif) : Au niveau du groove, oui. Même si ça reste forcément électro (il mime une guitare), on aura pas un son de guitare funk, ou une grosse basse, ou une distorsion.
Nico : Après, tout dépend de ce que tu appelles les « machines ». Nous, on sample et à partir de là, on a de la guitare, du piano, du violon, du violoncelle…
Frank : Je pense que plus on avance, plus on a quitté nos samples. Si tu passes de CAC 40 à Noise, Inact on a quitté tout ces samples de machines… Je pense qu’on peut tout faire. On fait ce qu’on veut en fait.

En parlant de samples, vous avez une collection de disques de dingues, non ?
Nico
(rêveur) : Ouais…
Frank : Non, on sample la télé.
Nico : Et les films.
Frank (il insiste) : Beaucoup de samples de films. Et merci beaucoup à Akaï d’avoir créer les CD de samples. Il existe beaucoup de CD pour sampler une seule note, de basse par exemple, et tu en fais ce que tu veux après. Ou des boucles un peu bizarres que tu peux reprendre et retravailler derrière. (pensif) Moi, c’est ce que je trouve vraiment magique dans les machines, tu peux vraiment faire tout ce que tu veux.
Nico : Les bandes son sont infinies. A chaque fois que tu rachètes un clavier, t’as 12 000 presets déjà existant, modulables… Avant que quelqu’un te dises, celui-là, je le connais, il vient de tel clavier…
Frank : Ouais, c’est vrai.
Nico : C’est rare qu’on ai pris un son tel quel. Sans lui remettre un petite couche.
Frank : Dans l’ère du sample, tu vas forcément tomber sur quelqu’un qui a utilisé le même truc que toi.

Le premier CD sonne comme un musique de film, êtes-vous inspiré par le cinéma ? Vous avez des références particulières ?
Frank
: Je suis cinéphile à fond. Je crois que si on devait coller des images sur notre musique ça serait du David Lynch. Ca nous a marqué aussi bien Nico que moi.
Nico : A terme, on aimerait aboutir à de la vidéo sur scène. On aimerait collaborer sur des courts métrages.
Frank : Des clips…
Nico : Mais on n’a pas eu le temps de mettre ça en place. On pense avant tout à la musique, que ça tourne bien sur scène, que ça sonne. On ne s’est même pas encore pris la tête sur les lumières. Pour l’instant, on privilégie le son, l’attitude. On essaie de jouer, de partager le moment tel qu’il est sur scène. On n’a pas mis la charrue avant les bœufs, avoir un spectacle qui tue et puis la musique qui ne suit pas. Mais c’est encore une histoire de collaborations, on aimerait bien trouver les gens. Là, on n’a pas le temps, ça serait compliqué. Et puis on ne saurait pas faire nos propres clips non plus, il faudrait l’aide d’autres personnes.

Vous avez quelque chose à rajouter pour finir ?
Nico
: On espère bientôt jouer à Paris.
Frank : C’est cool de ta part de t’intéresser à ce qu’on fait. Ca fait plaisir.

Et un grand merci à Frank et Nico de m’avoir consacré un peu de leur temps (et de m’avoir payé un coup à boire !)

Propos recueillis le 20 mai 2008.
http://www.soundofsilent.com/