mercredi 28 février 2007

Sean Lennon, la Cigale, 27 février 2007


Lorsque l’on évoque « Friendly Fire », le nouvel album de Sean Lennon, les mêmes critiques sont toujours émises à savoir : « Le même album sorti par Dupont n’aurai pas eu la même hype ». Déjà, il semblerait que la hype en question soit un épiphénomène français. En Angleterre, Sean, lui le fils de l’ex Beatle (mais aussi de Yoko Ono ceci expliquant peut-être cela) passe totalement inaperçu. Et aux Etats-Unis, la presse lui reproche d’être un gosse de riche, dilapidant l’héritage familial en studio, en sus d’un supposé dilettantisme. Dans un cas comme dans l’autre, sans tomber dans l’hagiographie facile, c’est faire bien peu de cas de la qualité de « Friendly fire ». Et je reste persuadé que d’être le fils d’une légende martyrisée ne l’a pas forcément aidé à écrire de bonnes chansons.

Bon revenons à d’autres considérations, car ce soir Sean vient défendre son album dans la superbe salle de la Cigale. Nous sommes ici à Pigalle, un de mes quartiers préféré, non pas grâce aux clubs d’effeuillage et autres cinémas pornos, mais grâce aux salles de concert. Ainsi sur le même trottoir de boulevard Rochechouart se succède La Cigale au numéro 120, la boule noire juste à côté, la superbe salle du Trianon au numéro 80 et l’Elysée Montmartre au numéro 72. Sans oublier le divan du monde dans la rue des martyrs, perpendiculaire au boulevard Rochechouart et le bus palladium. On trouve également beaucoup de boutiques d’instruments dans le coin.

La vieille salle de la Cigale est superbe toute noire avec des fauteuils rouges, le plafond, sculpté, est peint en peinture dorée. La salle dispose d’une fosse et d’une mezzanine décorée de modénatures tout comme les poteaux. L’endroit à une âme. Après une sympathique première partie assurée par Jean Racine, Sean fait son entrée en scène. Ils sont cinq sur scène : Sean chante et joue de la guitare sèche, Yuka Honda est aux claviers, un deuxième guitariste, le batteur et le bassiste complètent la formation. Le concert est très sage, les versions sont quasiment identiques à celles de l’album. Les musiciens restent une grande partie du show dans l’obscurité et s’acquittent de leur tâche avec un grand professionnalisme mais l’ensemble reste assez froid. Seule la jolie Yuka à l’air de s’éclater, il faut préciser qu’elle est la seule à avoir joué sur l’album. Heureusement le français mignon de Sean et son sens de l’humour permettent de sauver l’ensemble. Ainsi il réclame « plus du vin. Je ne peux pas continuer à jouer sans, c’est impossible. On est en France ! ». Et Sean quitte la scène en s’exclamant « je vais aller demander à quelqu’un ». Et en attendant « plus du vin » on va jouer une chanson. Quand le type revient avec un verre plein, Sean annonce : « lui, c’est Julien et il aime le whisky. C’est pas du vin c’est du whisky ! Je sais pas si je peux boire c’est fort ! Bon un petit peu alors. ». Et à la fin du concert il ne manque pas de remercier « le batteriste » avant de dire c’est « rant-ma quoi tu dis pas c’est rant-ma, c’est marrant» ! Le groupe jouera la totalité de l’album friendly fire et un inédit « Smoke and mirrors », la seule chanson rescapée du premier album « into the sun » est « mystery juice » jouée en rappel. Les versions live sont quasiment identiques au versions studios bien que « On again off again » me semble un peu plus cabaret. « Headlights » est jouée en solo acoustique. La reprise méconnue de T REX « Would i be the one » est plus longue, Sean prendra un solo de guitare wha-wha, sur une belle jaguar couleur crème, à la fin du morceau. Peut-être que ce concert était trop attendu, mais là comme ça à chaud, ça me laisse un goût ambivalent.

dimanche 25 février 2007

J.J Milteau : « Live Hot n’Blue »




L’harmoniciste, souffleur de blues, Jean-Jacques Milteau accompagné de son groupe sort un nouvel album enregistré live pendant la tournée 2005. J’ai eu la chance de voir ce Monsieur cinq fois en concert, et à chaque fois je suis ressorti de la salle avec un sourire jusqu’aux oreilles. Le disque procure la même « boogie euphorie » que celle ressentie pendant les concerts. Après deux titres instrumentaux, « Messin’ with the kid » et « T.M.C.P. », JJ et sa bande sortent de leur manche leur joker ultime à savoir la chanteuse texane Demi Evans (qui a par ailleurs sorti l’année dernière un excellent album en solo « Why do you run »). Que Demi fasse carrière en France est une bénédiction pour nos oreilles. Avouons le tout net, j’adore cette femme ! Elle possède une Voix rare, chaude et grave et beaucoup de coffre. Sans oublier cette faculté d’accélérer le débit (à la limite du rap) tout en restant mélodique qui fait des merveilles sur par exemple « Jack the man » (extraite du dernier album studio de JJ « Fragile »), hélas non incluse sur ce disque. Ecoutez l’exaltante version du traditionnel « Wade in the water » que Demi fini a cappella. Jean-Jacques est un harmoniciste virtuose et nous en apporte la preuve sur son « Boogie Mix » ou encore sur l’extraordinaire reprise du « What i’d say » de Ray Charles ou son harmonica sert de seul accompagnement à la voix de Demi. Soyons honnête, JJ et Demi sont particulièrement bien entouré sur ce live, le fidèle Manu Galvin à la guitare ; Andrew « Junior Boy » Jones à la deuxième guitare qui chante aussi fort bien « Make Some Changes ». La section rythmique Mark Mack à la batterie et le bassiste Felton Crews groove tranquillement, Benoit Sourisse saupoudre le tout de chaudes notes d’orgue. Bien évidemment l’achat de cet excellent album ne vous dispense en rien d’aller voir ce gentleman en concert car il est en sus un excellent pédagogue, érudit de la chose blues et soul. Chaque concert est une mine d’information sur l’histoire de ces musiques. JJ anime aussi tous les samedis à 19h « Bon temps rouler » une émission consacrée au blues sur la radio TSF (89.9) et croyez-moi sans lui on entendrait pas souvent James Carr, Dr John ou Johnny Adams (pour citer quelques uns de mes favoris) à la radio. Merci pour tout J.J.

samedi 24 février 2007

Paul Weller : Hit Parade


La sortie du coffret rétrospective nous donne l’occasion de revenir sur la carrière remarquable de l’un de mes musiciens favoris, l’anglais Paul Weller. Le coffret se présente sous la forme d’un digipak de quatre CDs avec un livret central. L’objet est fort joli, sur la pochette Paul, assez classe, arbore sa superbe guitare rickenbacker demi-caisse dont j’ai toujours été jaloux. Le coffret compile les 64 singles sortis au cours des trente années de carrière de Weller. Le premier disque est consacré à The Jam, le deuxième à The Style Council et les deux derniers à la carrière solo de Paul Weller.

1 – The Jam :

Paul Weller a formé son premier groupe The Jam alors qu’il était lycéen à Woking dans la banlieue de Londres. En 1974, agé de seize ans il découvre le « my generation » des Who et devient aussitôt mod. En 1977, The Jam sort son premier album « In the city ». Paul Weller a alors 19 ans, mais il affiche une maîtrise et un aplomb étonnants. Trio très énergique composé du bassiste Bruce Foxton et du batteur Rick Buckler, The Jam fut catalogué, faute de mieux, comme « punk ». Certes les guitares (assurées par Weller) sont on ne peut plus électriques mais The Jam est véritablement l’héritier des groupes mod des années 60 : The Who, The Small Faces, The Kinks dont ils reprennent l’esthétique. En effet pas de crête ou de perfectos cloutés chez Weller et sa bande mais de sobres costumes et cravates noirs sur chemises blanches. Au fil des albums (il y en aura six) The Jam s’éloigne de plus en plus du punk pour se rapprocher de la soul tout en gardant son énergie intacte. Le groupe a enregistré de nombreuses reprises R N'B entres autres war (Edwin Starr), fever, in the midnight hour (Wilson Pickett), move on up (Curtis Mayfield), see-saw, malheureusement non incluses ici. Le single « Town called malice » reprend la ligne de basse de « You can’t hurry love » de Diana Ross & The Supremes. Le dernier 45 tours du groupe, « Beat Surrender » est à la limite du disco. Mais Paul Weller tourne en rond et se sent de plus en plus étriqué dans la formule du trio, de nombreux musiciens extérieurs au groupe sont appelés en renfort : cordes, cuivres, claviers. En 1982, le groupe se sépare.

2 – The Style Council :

Formé en 1982, The Style Council ne fut pas vraiment un groupe mais plutôt un collectif autour de l’axe formé par le guitariste Paul Weller et le claviériste Mick Talbot (qui a également joué en renfort avec The Jam). Les fans de la première heure sont déboussolés tellement on est loin du rock n’roll des débuts. L’inspiration est ouvertement jazz, soul et rythm & blues, on pense notamment à The Gap Band. Weller et Talbot s’installent à Paris où ils vont enregistrer le premier album (café bleu sorti en 84) et en profitent pour faire de jolies photos au pied de la Tour Eiffel ou au terrasses des cafés avec une copie du quotidien Le Monde (qu’ils n’ont probablement pas lu) plié en quatre sur la table. La formation se stabilise avec le batteur Steve White et la chanteuse Dee C. Lee (qui sera un temps la compagne de Weller). Entre 1983 et 1986 The Style Council est excellent certains titres « Big Boss Groove », « Solid Bond in your heart » ou « Long hot summer » n’ont pas pris une ride. The Style Council et son mix groove/electro pose les fondations pour les groupes de la décennie suivante : Massive Attack ou Soul II Soul. Weller l’avoue : « A la fin de The Style Council je ne jouait pratiquement plus de guitare », il ne chantait plus tellement non plus. Le dernier album, « Modernism : A new decade», enregistré en 1989 et refusé par la maison de disque est une collection de grooves deep house. Une fois encore Paul à l’impression d’être arrivé au bout de sa route et The Style Council splitte à son tour.

3 – La naissance du Modfather :

1991 : Paul Weller repart de zéro, il n’a ni groupe ni maison de disque, reprend les choses et sa guitare en main et débute sa carrière solo. Les fans de la première heure respirent, Paul renoue avec ses racines rock n’roll. Back to the basics. Son premier disque en solo sort en 1992. Le timing est parfait, l’Angleterre est en ébullition, le rock reprend le dessus dans le sillage du mouvement Britpop. Weller se découvre une nouvelle armée de fans des Jam qui deviendront bientôt plus célèbres que lui. Les plus fervents sont certainement les Mancuniens d’Oasis. Fort de ce soutien et nombreuses collaborations qu’il entraine (plusieurs des musiciens l’accompagnant jouent également avec Ocean Colour Scene), Weller redevient « hip », il est le « Modfather ».

mardi 20 février 2007

Dave Chappelle’s BLOCK PARTY de Michel Gondry


Le film qui va vous réconcilier avec le hip-hop. Réalisé par Michel Gondry (La science des rêves, eternal sunshine of the spotless mind), l’ancien batteur de oui-oui, Block Party est l’un des meilleurs documentaires musicaux qu’il m’ait été donné de voir ces dernières années. La caméra suit le comique Dave Chappelle, relativement inconnu de ce côté ci de l’Atlantique, dans ses tribulations afin d’organiser une Block Party soit un concert de rue ou une fête de quartier, en septembre 2004, à Bed-Stuy, Brooklyn. Outre le concert en lui-même, la grande réussite du film est d’aller au-delà de la musique. On a ainsi la chance de pouvoir suivre Dave d’abord dans sa ville natale de l’Ohio où il essaye d’inviter un maximum de personnes, puis au cœur de l’action à Brooklyn où il visite l’incroyable maison de vieux hippies devant laquelle se trouvera la scène puis une école maternelle (qui fut celle de Notorious Big) sur le toit de laquelle il va installer les caméras. Le film est très humain, les scènes avec les enfants assez attendrissantes, tout cela grâce au charisme de Dave et à son humour, ses vannes constituant une bonne partie du métrage. On a l’agréable impression de se perdre dans Brooklyn et d’aller au contact des chaleureux habitants de Bed-Stuy. Puis il y a le reste, c’est à dire la musique. Et là, rien à dire, le casting est impeccable, aucune faute de goût. Pas de « biyatch » en string rose fluo et de gros flingues qui brillent au bord d’une piscine ici, c’est du hip hop, du vrai avec une âme (Soul), un discours et une conscience. Kanye West, Mos Def, Dead Prez, Common, Talib Kweli et The Roots qui servent de backing band. Et cerise sur le gâteau, la reformation des Fugees pour leur premier concert en 8 ans. Les scènes de concert gagnent énormément à la présence de musiciens live et des cuivres de la fanfare venue de l’Université CSU d’Ohio. Jill Scott, Cody ChesnuTT et Erikah Badu apportent une touche Soul à l’ensemble. Le montage alterne les scènes en live, les répétitions et les prises de vues backstage ce qui permet de s’immerger totalement dans l’événement, malheureusement un peu au détriment de la musique. Je terminerai avec mes coups de cœur d’abord l’émotion quand Erykah Badu accompagnée des Roots reprend « You Got Me » (extrait de l’album Things fall apart de The Roots). Ensuite la voix et la prestance scénique de Lauryn Hill et des Fugees pendant la reprise du Killing Me Softly de Roberta Flack (1973). Et enfin la scène où Wycleef seul à l’orgue Hammond devant un parterre d’étudiants ébahis (on le serait à moins) chante avec entrain « If i was President, i’ll stop the war »… Le concert que vous auriez aimé voir, le wattstax du 21ème siècle.

samedi 17 février 2007

TORTOISE / THE EX, Festival sons d’hiver 2007, Maison des arts de Créteil, 16 février 2007



Deuxième concert en une semaine à Créteil, mais Diantre, que se passe-t-il dans cette ville où même la fête de la musique ne génère pas de semblables agapes ? La maison des arts est une salle agréable en forme d’amphithéâtre, mais qui sert aussi pour des pièces de théâtre, des one man shows, des spectacles de danse. Il n’y a pas de fosse et tout le monde est assis, mais les fauteuils rouges matelassés sont très confortables. Les cubes de différentes teintes de bleu sur les murs lui donne un air très seventies, mais surtout l’acoustique de la salle est parfaite. C’est ici que j’ai assisté à mon premier concert avec mes camarades de classe (maternelle ou primaire je ne sais plus) notre institutrice nous avait emmené voir Pierre Chêne (ou était-ce Henri Dès ?).

La programmation du festival est en général excellente. L’année dernière Linton Kwesi Johnson, la légende vivante du reggae avait donné un concert d’anthologie pour une très rare apparition scénique. En 2005, le brésilien Seu Jorge avait mis le feu créant une ambiance comme on n’en a jamais connu ici et enfin en 2004, le guitariste de Philadelphie Jef Lee Johnson et son trio de blues avait donné un excellent concert terminé avec une reprise du « spanish castle magic » de Jimi Hendrix. Cette année encore, l’équipe qui organise le festival a réussi un coup fumant en invitant Tortoise, groupe/collectif de Chicago, qui n’est même pas en tournée mais qui a fait le déplacement pour deux concerts européen et une unique apparition en France, ici à Créteil, chapeau bas ! Les vétérans néerlandais de The Ex (le groupe existe depuis 1979) complètent une affiche qui s’annonce un tantinet plus rock qu’à l’accoutumée, mais peut-on encore parler de rock en évoquant Tortoise ?

The Ex joue son set en premier, ils sont quatre : batterie, deux guitares et le chanteur, à noter l’absence de basse. The Ex est un groupe essentiellement rythmique et assez peu mélodique, déstructuré et somme toute assez expérimental. Avec eux, même la guitare devient un instrument de percussion. Les deux guitaristes, l’un est gaucher, l’autre droitier, jouent sur de superbes Fender jazzmasters et s’opposent dans une étrange symétrie. Ça frappe dans tous les sens jusqu'à atteindre une sorte de transe rythmique. Les vitupérations du chanteur dominent l'ensemble. Le groupe trouve un point d’équilibre entre Sonic Youth et Television. Le chanteur et les deux guitaristes n’hésitent pas à se lancer dans des acrobaties assez risquées, ouh là là les garçons, gare à la fracture ! L’un des guitaristes frotte ses cordes du plat de la main avant de mordre à pleines dents les cordes de sa guitare. Mais qu’est-ce qu’il fout ? Mon Dieu, mon prof de gratte ferait une syncope en voyant ça. L’ensemble est assez bruyant mais pour peu que l’on soit dans le bon état d’esprit c’est sympa.

A l’autre bout du spectre se trouve Tortoise. Depuis 1990, Tortoise, groupe totalement instrumental construit autour du batteur/producteur/ingénieur du son John Mac Entire, explose les structures du rock indé. Tortoise emprunte au Jazz (mais le plus free possible), à la musique électronique et enfin au rock indépendant. Ils sont cinq, disposés en arc de cercle. A chaque extrémité du demi-cercle, deux batteries se font face. Chaque musicien change régulièrement d’instrument. Aux classiques guitares, basses et claviers/samplers s’ajoutent vibraphone et marimba pour la note exotique. Le groupe est assez statique et commence son set avec une intrigante formation à deux basses avant d’utiliser une intéressante formule à deux batteries pour « Swing from the gutters » extrait du sublime album TNT (sorti en 1998). Le concert est excellent, évidemment avec un groupe aussi expérimental et difficile d’accès que Tortoise, on aurait pu craindre quelque chose d’assez clinique. Mais ce n’est absolument pas le cas, le groupe réussit à créer du swing en pleine expérimentation sonore, les trois musiciens se succédant à la batterie sont tous excellents.

A la fin, on assiste à la réunion, les quatre de The Ex rejoignant les cinq de Tortoise sur scène. Trois batteries et autant de guitares, le chanteur est obligé d’utiliser un mégaphone pour se faire entendre ! Très franchement on se situe là à la limite de l’écoutable, tellement c’est bruyant.

mardi 13 février 2007

Des nouvelles de luTTès

Un email reçu ce matin me permet d'apporter des petites précisions sur le groupe LuTTès (cf mon post du 10 février). Donc luTTès existe dans sa forme actuelle depuis un an et demi et ils sont présentement en train d'enregistrer leur premier album, ils doivent encore enregistrer les voix et assurer le mixage du disque. Leur premier album devrait sortir prochainement, mes oreilles en frémissent d'avance !

http://www.luttes.com/

lundi 12 février 2007

Bloc Party. : "A week end in the city"


Le problème avec les groupes type Bloc Party, c’est qu’ils génèrent un tel emballement médiatique, qu’il en devient difficile de discerner le bon grain de l’ivraie. La moindre critique est perçue comme le commentaire d’un ringard coincé dans une faille temporelle. Le premier album de Bloc Party, silent alarm, m’avait pourtant laissé un goût mi-figue mi-raisin. Au final, seul le dernier quart du disque m’avait vraiment emballé, et la fin en apothéose sur le titre « compliments ». Impression encore renforcée par le concert bâclé de la cigale ou ces quatre branleurs avaient expédié leur set en quarante minutes (avant de revenir tout de même par trois fois sur scène). Finalement, j’en avais fini par oublier jusqu’à l’existence même de Bloc Party, le CD finissant par prendre la poussière dans un coin, ce qui est finalement le lot commun de tous les ex –« nouveaux Beatles » d’Angleterre. Et pendant ce temps là, l’alarme était de moins en moins silencieuse, Bloc Party passant en quelques mois à peine du statut d’inconnus, jouvenceaux balbutiant leur new wave à celui de stars confirmées remplissant le zénith de Paris.

Aujourd’hui, deux ans après les faits, Bloc Party se rappelle à notre bon souvenir et l’effervescence ne se calme toujours pas, les prochains concerts à l’Olympia sont déjà complets. Le nouvel album s’appelle «A week end in the city » et s’articule autour du concept d’une fin de semaine à Londres et plus généralement de la vie Londonienne. Et contrairement aux apparences, cela n’a rien de très glamour : racisme, hypocrisie et homo phobie sont au programme. L’album s’ouvre sur « Song for Clay (disappear here) », après un premier couplet assez calme la machine s’emballe brutalement dans le sillage de la formidable scansion du batteur Matt Tong. Le reste est à l’avenant, les paroles, elles, suintent le désenchantement. Les beats disco/dance floor, ont pratiquement disparus les guitares se font plus agressives, en particulier sur « Uniform » même si quelques effets ambiant calment l’ensemble. L’album est plus urbain (le groupe porte bien son nom) et tendu que ne l’était silent alarm et me rappelle un peu le « relationship of command » d’At the drive-in, en plus calme tout de même. Seul les titres « Kreuzberg » et "SRTX" rappellent le premier album. Les intonations à la Robert Smith ont quittées la voix de Kele, le chanteur. S’affranchissant des ses influences, Bloc Party a mûri, espérons que la hype, arrivée bien trop vite, ne tue pas dans l’œuf la carrière de ce groupe prometteur.

samedi 10 février 2007

Luttès, MJC club de Créteil, café musiques, 9 février 2007


Il n’y a pas que Paris dans la vie. Ce soir, back in town, je retourne dans ma bonne veille banlieue où j’ai grandi. Rendez-vous est donc pris au café musiques de la MJC club de Créteil qui organise ce soir son concert annuel. Le café musiques est perdu au milieu des barres HLM d’une cité et est attenant à un terrain de basket et de foot. En contrebas, la nationale écoule son maigre flot de voiture par une nuit pluvieuse. Soyons honnêtes, le café musique n’a pas le cachet des salles de paname, mais l’endroit est tout petit et très convivial. L’entrée est à cinq euros, la bière coûte deux euros, voilà qui est rafraîchissant.

La première partie est assurée par un groupe de jouvenceaux cristoliens (leur chanteuse Sarah fête ce soir ses 20 ans), pratiquant la reprise, dénommé Jag's. Ils connaissent leur classiques : Beatles, Stones, Police, Chuck Berry. Ils ont réussi l’exploit de tirer quelque chose d’écoutable du « Baby one more time » de Britney Spears, revisité ici à la guitare saturée (comme quoi tout est possible). Agréable surprise avec le « Are you gonna be my girl » de Jet. Fausse note par contre sur « Sweet home Chicago », certes parfaitement exécuté mais manquant de tripes, nécessaire à tout bon blues. Au final une première partie agréable mais rien qui laissait présager de la déflagration à venir.

Il est 22 heures quand Luttès attaque la scène. Renseignement pris, ils galèrent depuis des années, aux quatre coins de l’Hexagone sans jamais avoir réussi à enregistrer un album. Quelle injustice. Luttès est le secret le mieux gardé du rock français. Luttès pratique un rock plutôt littéraire d’obédience Noir Désir (qui reste envers et contre tout le mètre étalon du rock francophone à l’aune duquel sont jugés tous les groupes). Ces mecs ont probablement dû grandir en écoutant leurs disques entre deux lectures. Le chanteur, Grégoire est une véritable bête de scène, se vide les tripes et possède une faconde admirable. Il se lance constamment dans des tirades impossibles et incompréhensibles à un tel point que Romain (le batteur) et Chadi (le guitariste) finissent par lui crier en cœur : « FERME TA GUEULE » ! Ce à quoi Grégoire réponds dans un sourire géant : « je vous aime »! Quel poète cet homme là. Ils sont, d’une manière générale très en verve, dans une veine, anti-société de consommation, seule Julie, la bassiste, restera assez discrète. Le mur du son est énorme, mais quelques chansons à la guitare acoustique permettent de respirer. Quelques interventions un peu plus funky et un excellent breakbeat hip hop sur « Elle en rêve » aèrent l’ensemble. Espérons qu’ils puissent enregistrer un album rapidement. La lutte pour la bonne musique n’est pas finie !
Site internet de Luttès :

mercredi 7 février 2007

Jean Leclerc : "Mexico"


Il n’y a pas que Céline Dion et Garou au Québec. Il y a même eu et encore d’excellents groupes de rock (cf. mon post sur le nombre). Malheureusement, certaines choses ne traversent pas l’Atlantique. Et c’est d’autant plus regrettable car nous partageons la même langue maternelle avec le Québec et nous avons donc un important patrimoine culturel en commun (la même remarque est aussi valable pour l’Afrique). Prenez Jean « Dead Wolf » Leclerc. Dans les années 90, il a eu sa petite heure de gloire sous le pseudonyme « Jean Leloup » (a.k.a Johnny The Wolf) avec une chanson intitulée 1990, sortie à peu près à la même époque, et qui a même connu les honneurs du TOP 50. 1990 n’est pas, loin s’en faut, sa meilleure chanson, elle est pourtant (inexplicablement) la seule à avoir eu une quelconque résonance chez nous. Après avoir organisé son Rock n’Roll suicide à la Ziggy Stardust, Leloup renaît sous son nom de baptême de Leclerc, et un nouvel album intitulé « Mexico ». Première constatation, le disque sonne beaucoup plus funky que d’habitude, est-ce en Afrique où il a en partie grandi que Jean a chopé un tel sens du rythme ? Adieu donc les guitares acoustiques et vive les guitares électriques, pédales wha-wha, delay donnant un effet « chewing gum » au son. Selon les indications de la pochette, Jean a joué tous les instruments et assuré toutes les voix sur le disque, sans oublier le mix et la production. Il convient donc de saluer la somme de travail que cela représente. Mais peut-être touche-t-on là la limite. Car malgré quelques bons moments, l’ensemble sonne comme un patchwork sonore (l’album compile 17 titres en 50 minutes), avec une tonne d’idées plus ou moins bonnes. Un ingénieur du son ou un producteur l’aurait aidé à faire le tri entre les bonnes ou fausses bonnes idées. Un album agréable malgré tout.

dimanche 4 février 2007

Playlist

Etant un jeune homme moderne, il m’arrive parfois de laisser tomber mon tourne disque et mes vinyles (et vous êtes priés de ne pas rire car je tiens beaucoup à ma platine et à mes 33 tours ainsi qu’à mes guitares). J’ai donc récemment fait l’acquisition d’un téléphone, lecteur MP3. Voici ma playlist, qui n’est ni parfaite, ni idéale car jamais rien ne l’est dans la vie (à commencer par ledit téléphone que j’ai toutes les peines du monde à faire fonctionner).

1-Bettye LaVette : Joy
On commence par un extrait du dernier album en date de Bettye, « I’ve got my own hell to raise ». Le titre est porté tout du long par un riff de guitare gras et bluesy à souhait. Bettye excelle dans ces conditions minimales qui mettent sa Voix le plus en valeur. Cette Voix cassée, laisse passer toute une palette d’émotions bien plus que les paroles (They took my joy/i want it back), faisant, je pense, référence à sa carrière en dents de scie, ne le laissent présager de prime abord. Cette Voix, entre cri de douleur et rage de vivre, c’est de la Soul, du Blues à l’état pur. J’ai eu la chance de rencontrer une fois Bettye un soir après un concert au New Morning, elle m’avait accueilli avec un monumental « Hello Sweetheart », je ne m’en suis jamais remis ! Maximum respect à cette Grande Dame.

2 – The BellRays : Tell a lie
Ah les BellRays ! Bien qu’originaire de Californie, les BellRays respirent Detroit, la motown mais aussi (surtout) les groupes de rock furieux (MC5, Stooges) de la fin des années 60. Un peu comme si Aretha Franklin était tombée dans le grand bain punk. Aussi improbable que cela puisse paraître, force est de constater que la formule, qu’ils ont baptisée « Maximum Rock n’Soul » (En fait tout ce que j’aime), fonctionne. Et même particulièrement bien sur ce « Tell a lie » tout en groove, basse énorme, guitares wha-wha et cuivres à l’appui. Créant ainsi le parfait écrin pour la chanteuse Lisa Kekaula, une des grandes Voix de notre époque. Attention, le groupe est particulièrement explosif sur scène.

3-Tower Of Power : To say the least you’re the most
Prenons maintenant la direction de la baie de San Francisco (Oakland). Bien plus que les chanteurs (interchangeables), c’est la section de cuivres qui est la star du groupe. Requins de studio ils ont enregistré et/ou partagé la scène avec les trois-quarts de l’industrie. De James Brown à John Lee Hooker en passant par les Meters et même Eddy Mitchell ! Extrait de l’album « Urban Renewal » (1975), T.O.P est à son apogée. Swing impeccable, assuré par le batteur David Garibaldi, solo de sax à perdre haleine, chant sur le fil, ce morceau dégage un groove à s’en faire péter les articulations. La suite sera beaucoup moins glorieuse le groupe glissera peu à peu vers un disco/funk enregistré au mètre.

4-Sharon Jones and the dap-kings : Natural Born Lover
Faites le test auprès de vos amis, passez le disque et demandez-leur de deviner la décennie où il a été enregistré. « Les années 60 » ! S’exclameront-ils en cœur. Tout faux, Sharon est une chanteuse de New York et bien de notre époque. Mais tout de la pochette au son ressemble à la grande époque du Rythm & Blues. Petit détail amusant, la pochette (comme toutes les productions Daptones Records) n’indique pas l’année de sortie du disque (2005) afin de nous induire un petit peu plus en erreur.

5-Sharon Jones and the dap-kings : Stranded in your love
Toujours extrait de l’excellent album “Naturally”, voici un duo entre Sharon et Lee Fields particulièrement cinématographique, basé sur un schéma « scène de ménage/réconciliation » alternant les dialogues et le chant. A noter l’excellent travail de production de Bosco Mann où la multiplicité d’arrangements (piano, cuivres, cordes) trouve naturellement sa place sans que l’ensemble ne sonne surproduit. Du grand art.

6 – Brian Jonestown Massacre : In India You
Les spectateurs ayant vu le documentaire “Dig!” le savent, Anton Newcombe, leader de BJM est aussi cintré que génial. Et nous en apporte la preuve avec ce « In India You », grand barnum psychédélique à base de sitar, guitare acoustique, orgue, flûte, percussions diverses et variées et voix éthérée. Hallucinant (dans tous les sens du terme) !

7-Brian Jonestown Massacre : Feelers
Toujours extrait de l’album « Their satanic majesties second request » (quel titre !) sorti en 1996, le groupe de San Francisco nous fait un cirque à peu près semblable à celui du titre précédent. Mais comme je ne m’en lasse pas, j’en reprends une part !

8-The Richmond Sluts : You drive me wild
Les Richmond Sluts furent, très brièvement, les “Rolling Stooges” de San Francisco. Extrait de leur unique album, sorti en 2001, « You drive me wild » porte particulièrement bien son titre. Tout le sel du groupe vient de cet orgue, apportant une petite touche groovy et psychédélique à une formation très orientée garage/rock n’roll par ailleurs. Quelques informations glanées sur My Space, m’apprennent que Shea (guitare/voix) et Chris (basse) ont depuis laissé tomber la musique. Dommage.

9-The Lords of Altamont : Time
Reprise du classique des Chambers Brothers (un groupe de rock black des années 60) pour ce groupe rock n’roll tendance bikers de Los Angeles mené par Bobby Cavaliere (chant/orgue). Les guitares sont encore plus grasses et énormes que chez les Richmond Sluts mais l’orgue farsifa permet de calmer quelque peu les choses (enfin tout est relatif).






10-Wraygunn : Keep on Prayin’
Les Wraygunn sont originaires de Coimbra (Portugal) et chantent en Anglais. Dans le genre échappé de l’asile, leur leader Paulo Furtado (a.k.a The Legendary Tiger Man) fait une sérieuse concurrence à Anton Newcombe. Ce titre, extrait de l’album ecclésiastes 1.11 sorti en 2006, mélange habilement rock et cœurs gospel. Avec orgue hammond et quelques scratches pour la note moderne. Et la sublime Voix de la non moins sublime Raquel…




11-Pamela Hute : My Dear
Petite note frenchy pour finir avec un extrait de l’excellent maxi sorti par Pamela l’année dernière, qui n’a pas, hélas, la distribution que son talent mérite. My Dear est un concentré d’efficacité rock de 1 minute 43 secondes ponctué par une hallucinante descente de guitare/basse. Bravo ! Ajouter une image